L’Europe va interdire la pêche utilisant le chalutage de fond dans les zones protégées
24 février 2023
24 février 2023
La Commission européenne s’est fixé l’objectif de protéger 30 % des mers d’ici à 2030. Les pêcheurs dénoncent une mesure dévastatrice.
C’est un sujet qui crée beaucoup de remous chez les pêcheurs. Mardi, la Commission européenne a dévoilé un train de mesures pour rendre le secteur de la pêche plus durable et plus résilient.
Parmi celles-ci, son « plan d’action » pour protéger et restaurer les écosystèmes marins, fait déjà polémique, avec sa mesure phare interdisant progressivement, d’ici à2030, la pêche utilisant le chalutage de fond (chaluts, dragues, filets maillants…) dans les zones maritimes protégées. Une pratique que l’UE considère comme l’une des activités les plus dommageables pour les fonds marins et qu’elle a déjà interdite depuis 2016 au-dessous de 800 mètres.
Bruxelles s’est fixé l’objectif de protéger 30 % des mers du Vieux Continent – contre 12 % aujourd’hui, dont une protection « stricte » pour un tiers de cette zone, d’ici à 2030. L’exécutif bruxellois va donc demander aux Etats membres d’accroître leurs zones protégées. Il vise aussi, entre autres mesures, à améliorer la sélectivité des engins de pêche.
« Il faut une transformation plus rapide, plus structurelle pour réduire l’impact environnemental et climatique de la pêche et de l’aquaculture, a justifié Virginijus Sinkevicius, le commissaire à l’Environnement, aux Océans et à la Pêche. Cela est nécessaire pour restaurer un environnement marin sain et pour garantir la sécurité alimentaire. Cela permettra aussi à ce secteur de faire des bénéfices et de devenir plus résilient. »
Les pêcheurs ont déjà fait connaître leur opposition à cette mesure, la jugeant économiquement dévastatrice. Pour l’Alliance européenne pour la pêche de fonds, elle mettra « en danger 7.000 navires » correspondant à « 25 % des volumes débarqués dans l’UE et à 38 % des revenus totaux de la flotte européenne ». Les ONG écologistes ont, elles, jugé trop lent le calendrier de la Commission.
« On ne propose pas une interdiction à proprement parler, a répondu le commissaire. En premier lieu, nous enjoignons aux Etats membres de mettre en oeuvre l’ensemble des mesures pertinentes pour ces zones marines protégées d’ici mars 2024. Puis nous les évaluerons pour entamer ensuite une proposition de nature législative exigeant une analyse d’impact sur les répercussions pour le secteur. Nous avons une approche prudente ».
L’UE demande aussi une meilleure protection de différentes espèces menacées de poissons, en réduisant le taux de mortalité et « les prises accessoires ». Le marsouin dans la mer Baltique et la mer Noire, le dauphin dans le golfe de Gascogne, le requin-ange, le poisson-guitare, le grand requin blanc, le phoque moine de Méditerranée ou encore les tortues marines sont concernés.
La Commission prévoit aussi une batterie de mesures pour accélérer la transition énergétique du secteur. Et surtout réduire l’impact socio-économique des prix de l’énergie, l’un des éléments les plus coûteux, la pêche étant trop dépendante des énergies fossiles, ce que Virginijus Sinkevicius juge « mortifère ».
« En 2022, les prix du diesel marin ont plus que doublé par rapport à 2021, ce qui a entraîné une augmentation des coûts énergétiques de 13 % des revenus en 2020 à environ 35 %. Vous pouvez imaginer l’impact dévastateur… », a-t-il pointé. De nombreux pêcheurs ont ainsi dû cesser temporairement leurs activités ou demander une aide financière publique.