Le jumeau numérique de l’océan
1 février 2023
1 février 2023
Le groupement de recherche « Océan et mers » du CNRS a proposé les 25 et 26 janvier dernier de découvrir « l’océan dans toutes ses dimensions », y compris sous une forme virtuelle avec « le jumeau numérique de l’océan » développé par la société française Mercator Océan International à Toulouse. Ce métavers des mers permet aux chercheurs du monde entier d’anticiper les effets de la crise climatique dans les milieux marins.
Avec les derniers développements des technologies de virtualisation 3D, il est désormais possible de créer un monde parallèle au nôtre, qui serait aussi fidèle que l’original. Ces doubles numériques permettent aux chercheurs d’étudier l’évolution des désordres environnementaux qui s’amplifient sous la pression des activités humaines. Prévoir afin de mieux préserver notre patrimoine océanique, tel est l’objectif du jumeau numérique de l’océan que développe, à la demande des instances européennes, la société Mercator Ocean International.
Cette simulation informatique qui carbure aux programmes d’intelligence artificielle se nourrit de toutes les données issues des observations océaniques satellitaires ou provenant de capteurs en mer, explique Ronan Fablet, enseignant à IMT Atlantique et chercheur en sciences du numérique au laboratoire Lab Sticc de Brest. Il est interrogé par Jeanne Richard, notre spécialiste environnement.
« On peut observer les océans depuis l’espace, pour collecter des données, on déploie aussi des capteurs qui vont plonger dans l’océan puis remonter en délivrant un certain nombre de mesures, comme la température ou la salinité de l’eau, par exemple, ou encore la concentration en zooplancton ou en phytoplancton dans une zone. Ces informations seront ensuite transmises par satellite et intégrées dans la base de données du « jumeau numérique » », explique Ronan Fablet. « Si un chercheur s’intéresse au climat, ces mesures lui permettront d’évaluer l’élévation de la mer ou la progression de la température des océans, mais ce « jumeau numérique » se relève utile pour observer les activités des pêcheries en récupérant des données sur le nombre de navires, les tonnages de pêche ou encore les déplacements et les concentrations de bâtiments dans une zone précise pour étudier leur impact sur l’environnement maritime. »
Puis Ronan Fablet poursuit : « Cette multitude de données issue des différents systèmes d’observation nous permet actuellement de bien visualiser ce qui se passe à la surface des mers, en revanche, pour étudier les profondeurs du milieu océanique, nous manquons encore d’informations », dit-il. « Afin de compenser ce déficit de données d’observation, nous disposons de modèles mathématiques et de programmes d’intelligence artificielle. Et nous combinons les données d’observations avec ces modélisations mathématiques pour que le « jumeau numérique » puisse avoir des capacités de prévisions et de scénarisation sur l’évolution de l’océan. »
L’Espagne, l’Italie, la Norvège, le Portugal, le Royaume-Uni et la France s’étaient engagés à transformer la société Mercator Ocean International en une « organisation intergouvernementale en charge du premier océan numérique du monde ». Cette nouvelle structure est destinée aux chercheurs, aux industries de la mer, aux gouvernements, mais aussi aux associations et à l’ensemble de la société civile. Le jumeau numérique océanique offre ainsi un outil d’aide à la décision ouvert à tous les pays, pour trouver collectivement des solutions à la crise environnementale qui affecte notre planète bleue.