Le G7 promet de mettre n à sa pollution plastique en 2040, un horizon lointain
20 avril 2023
20 avril 2023
Des éboueurs enlèvent plastique et autres débris échoués sur la plage de Kedonganan, sur l’île balnéaire indonésienne de Bali, le 12 avril 2023. SONNY TUMBELAKA / AFP
C’est la principale annonce du G7 qui réunissait les ministres du climat, de l’énergie et de l’environnement à Sapporo (Japon), les 15 et 16 avril : « Nous nous sommes engagés à mettre n à la pollution plastique, avec l’ambition de réduire à zéro toute pollution plastique supplémentaire d’ici à 2040 », a rment les ministres des sept puissances industrielles (Etats-Unis, Japon, Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie et Canada) dans un communiqué publié dimanche 16 avril. Le ministre français de la transition écologique, Christophe Béchu, veut y voir un « signal fort » avant un nouveau round de négociations intergouvernementales prévu n mai à Paris autour du futur traité international contre la pollution plastique.
Il y a un an, le 2 mars 2022, 175 pays adoptaient, sous l’égide des Nations unies, une résolution quali ée d’« historique » visant à élaborer d’ici à la n 2024 un traité juridiquement contraignant. Depuis, une coalition regroupant une cinquantaine de pays dont la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni défend un texte dit de « haute ambition » qui vise, précisément, la n de ce type de
pollution à l’horizon 2040. Avancée de la réunion du G7 : les Etats-Unis et le Japon seraient désormais prêts à s’aligner sur cet objectif.
« 2040, c’est très, très tard au vu de l’urgence », commente Muriel Papin, de l’association No Plastic in my Sea, qui suit de près les négociations autour du traité. L’urgence est à la hauteur de la menace.
Chaque minute, l’équivalent d’un camion poubelle rempli de déchets plastiques se déverse dans les océans. Au rythme actuel, la pollution des océans (11 millions de tonnes par an) aura quadruplé d’ici à 2050.
Selon le Programme des Nations unies pour l’environnement, 300 millions de tonnes de déchets plastiques sont engendrées chaque année à l’échelle de la planète. Un danger pour les écosystèmes marins et la biodiversité : 1,4 million d’oiseaux et 14 000 mammi ères marins meurent tous les ans en raison de l’ingestion de plastiques. Une menace pour la santé humaine : toute la chaîne alimentaire est contaminée par les microplastiques – dont on estime que chaque individu consomme chaque semaine l’équivalent d’une carte bancaire – et les substances toxiques contenues dans les plastiques. Une pollution hors de contrôle qui touche tous les recoins de la planète, jusqu’au sommet de l’Everest ou la banquise de l’Antarctique.
Et la menace n’est pas près de se dissiper : la production mondiale de plastique a doublé entre 2000 et 2020 pour atteindre 460 millions de tonnes par an. Elle devrait irter avec le milliard à l’horizon 2050, tirée par le secteur de l’emballage, nouveau gisement de développement pour l’industrie pétrogazière.
Le plastique est également une plaie pour le climat : toujours à horizon 2050, les gaz à e et de serre associés à la production, à l’utilisation et à l’élimination des plastiques devraient représenter 15 % des émissions mondiales.
Les pays du G7 entendent mettre un terme à ce éau en « promouvant la consommation et la production durables de plastiques, en augmentant leur circularité dans l’économie et en gérant les déchets de manière écologiquement rationnelle ». Pour les Etats, la piste à privilégier est d’abord celle du recyclage et de la sortie du plastique à usage unique. En France, cette dernière est déjà xée à
2040 par la loi antigaspillage de 2020. Emmanuel Macron l’a encore martelé dimanche sur Twitter : la solution passera « par l’économie circulaire, par 100 % de plastique recyclable et recyclé ». Sauf que si l’Europe recycle aujourd’hui un peu plus du tiers de ses déchets plastiques, au niveau mondial, comme aux Etats-Unis, on stagne sous les 10 %. Tout le reste nit dans l’environnement, en décharge ou brûlé dans des incinérateurs.
« Miser sur le recyclage pour réduire la pollution, c’est se prendre les pieds dans le tapis de l’économie circulaire, ou jouer sur les mots pour gagner du temps à continuer à utiliser et polluer avec du plastique », estime Nathalie Gontard, directrice de recherche à l’Institut national de la recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE). Pour cette spécialiste des emballages plastiques, le recyclage du plastique est une « illusion » : « à l’exception des bouteilles en PET qui ne représentent que 1 % des plastiques que nous utilisons, on ne sait pas reproduire le plastique à l’identique ; à la n, cela reste toujours un déchet. »
La chercheuse pré ère le terme de « décyclage » : « On stocke les plastiques usagés sous la forme d’autres objets (vêtements, matériaux de construction, cintres, pots de eurs…) qui vont continuer à se dégrader en micro et nanoparticules qui persistent des siècles dans l’environnement comme les polluants éternels. Il n’y a aucun e et sur la pollution plastique. » Pour Nathalie Gontard, « la seule solution qui a un sens aujourd’hui, vu l’emballement de l’utilisation des plastiques, est de demander à tous les secteurs industriels de contribuer aux e orts de transition en nous proposant des biens et des services n’utilisant que le strict minimum de plastique ».
« fortement contraignant » avec des objectifs de réduction de la production de plastique et des interdictions pour les polymères les plus problématiques, comme le polystyrène. Au sein de la coalition de « haute ambition », on évoque des quotas ou des taxes sur la production de plastique neuf pour inciter à sa réduction. La Chine est à l’origine d’un tiers de la production mondiale de plastique. Elle ne fait partie ni de la coalition ni du G7.