Comment la Chine déploie sa considérable force de pêche sur tous les océans

 

Une enquête du « New York Times » montre la rapide expansion de la flotte hauturière chinoise dans les eaux internationales. Pékin y déploie des moyens industriels pour compenser la baisse des ressources dans ses eaux territoriales.

Pour assouvir son appétit gargantuesque, la Chine n’hésite pas à aller pêcher loin, et beaucoup. En l’espace de vingt ans, elle s’est constitué la plus large flotte de pêche en haute mer, avec environ 3.000 navires. Mais, ayant déjà considérablement affaibli les ressources halieutiques près de ses côtes, ceux-ci se déploient désormais sur tous les océans, à une échelle parfois considérable, bien supérieure à celle des pays le long desquels ils officient.

« L’impact se fait de plus en plus sentir depuis l’océan Indien jusqu’au Pacifique sud, des côtes africaines à celles de l’Amérique du Sud, une manifestation en haute mer de la puissance économique chinoise », estime le « New York Times ». Le quotidien américain a compilé les parcours des navires de pêche chinois sur 2020 et 2021, à partir des données qu’ils ont transmis, et a ainsi pu reconstituer les mouvements de cette impressionnante flotte sur une carte interactive.

Une méthode industrialisée

Celle-ci montre que les pêcheurs chinois se déploient en nombre vers l’Equateur, le Pérou et jusqu’au long des côtes de l’Argentine, dans l’Atlantique sud, à une échelle inédite. Des vaisseaux-usines réfrigérés se rendent régulièrement auprès des différentes flottilles en opération pour récupérer leurs cargaisons et les ravitailler en pleine mer. Ce qui permet aux navires de ne pas avoir à rentrer aux ports et de pêcher quasiment sans interruption tout au long de l’année.

C’est ainsi que la Chine a colonisé les eaux très poissonneuses des Galapagos. A l’été 2020, près de 300 bateaux chinois opéraient autour de l’archipel équatorien, représentant… 99 % des captures. A chaque fois en s’approchant au plus près des limites des eaux territoriales de l’Equateur, « au point parfois que les mouvements des navires dessinent les contours de la zone sur la carte », note le « New York Times ».

Récriminations de l’Equateur

L’exemple des Galapagos a attiré l’attention internationale sur la pêche industrielle chinoise. « L’échelle à laquelle elle opère inquiète sur les dommages causés aux économies locales et à l’environnement, ainsi que sur la durabilité de la pêche du thon, du calmar et d’autres espèces », poursuit le journal.

L’Equateur a bien protesté auprès de Pékin sur le cas des Galapagos : le pays craint que les réserves halieutiques de la zone se retrouvent épuisées rapidement, tandis que les pêcheurs locaux se plaignent d’une concurrence déséquilibrée. Le gouvernement chinois a accepté de faire quelques concessions, instaurant un moratoire sur certaines zones, s’engageant à plafonner la taille de sa flotte en eau profonde (mais pas à la réduire), et réduisant les subventions gouvernementales à ses entreprises de pêche, dont beaucoup sont encore détenues ou contrôlées par l’Etat.

Dans l’année qui a suivi ces protestations, « une grande partie de la flotte chinoise s’est éloignée de la zone économique exclusive de l’Equateur. Mais elle a continué de pêcher tout autant », conclut le « New York Times ».

Source: Les Echos