Exploration des fonds marins: les avantages de la Grande péninsule

Débattu en deuxième lecture, mardi dernier au Parlement, l’Offshore Petroleum Bill continue de susciter un vif intérêt. Le projet de loi controversé vise à remplacer la Petroleum Act de 1970, mais aussi à régulariser l’extraction du pétrole via le Department for Continental Shelf, Maritime Zones Administration and Exploration du Prime Minister’s Office (PMO). En février 2020, un accord pour les levés géoscientifiques a été signé entre le PMO et CGG Services SAS pour réaliser des données sismiques multiclients sur une zone d’exploration couvrant un total d’environ 45 000 kilomètres linéaires dans quatre zones sélectionnées de la Zone économique exclusive (ZEE) de Maurice qui s’étale sur 2,3 km². «L’acquisition de données sismiques est importante pour mieux comprendre la géologie du sous-sol et les structures associées qui sont favorables à l’accumulation d’hydrocarbures», avait déclaré le chef du gouvernement, Pravind Jugnauth. 

Vendredi, la Grande péninsule a rejoint le club d’élite des grandes nations notamment les États-Unis, la Russie, le Japon, la France et la Chine en lançant la mission «Samudrayan», avec son submersible Matsya 6000, pour explorer les fonds marins à la recherche de ressources marines telles que les nodules polymétalliques de manganèse, les hydrates de gaz, les sulfures hydrothermaux et le cobalt dans sa ZEE et le sud de l’océan Indien. Une première. L’engin peut transporter trois personnes, soit un pilote et deux scientifiques, et devrait, après des essais, être opérationnel en 2024. 

Une coïncidence ? Sunil Dowarkasing, ancien Global Strategist de Greenpeace et expert environnemental, félicite l’Inde pour «cette avancée technologique extrêmement intéressante», un succès pour la Grande péninsule, mais un lancement qui interpelle. «L’engin est lancé en même temps que le Petroleum Bill. Est-ce une coïncidence ? On s’interroge. Le gouvernement a la majorité au Parlement. Nous ne pourrons empêcher cette loi d’être promulguée. Je n’ai aucun problème à ce que notre ZEE soit explorée, mais il faut plus de transparence. Qui ira explorer la ZEE ?» Ce dernier concède toutefois que l’Inde possède des avantages par rapport aux autres pays, étant familière avec notre ZEE. 

«Étrange coïncidence» 

Vijay Makhan, ancien ambassadeur et ancien secrétaire des Affaires étrangères, estime que de nombreuses recherches sous-marines ont eu lieu et qu’un accord pour l’exploration de nos eaux territoriales n’est pas exclue. «Attendons voir.» Si pour une autre source c’est une «étrange coïncidence», elle n’en dira pas plus jugeant le dossier trop délicat. En tout cas, en sus de concevoir un engin avec une autonomie de 12 heures et 96 heures supplémentaires en cas d’urgence, l’Inde dispose d’informations sur la base d’études hydrographiques qu’elle a menées. En effet, cette zone qui s’étend du canal du Mozambique à Agalega est riche en ressources naturelles avec un grand potentiel pour l’exploration pétrolière. Un article rédigé par un spécialiste de la géostratégie, Kaplan, mentionne qu’Agalega détient 80 % des réserves mondiales de pétrole, 17 % du gaz naturel et 40 % du trafic de pétrole et de gaz naturel. De plus, Agalega se développe à vitesse grand V pour accueillir des navires gigantesques à son port. 

Le déploiement des bâtiments de la marine indienne dans notre ZEE a permis à l’INS Sarvekshak, par exemple, de mener des opérations conjointes avec la National Coast Guard dans le cadre d’une étude hydrographique et la surveillance de la ZEE du 31 janvier au 3 février 2013. Cette visite se situait dans le cadre de la coopération bilatérale accrue entre l’Inde et Maurice par rapport à l’hydrographie et les questions maritimes. Depuis la signature en octobre 2005 d’un protocole d’accord portant sur la coopération dans le domaine de l’hydrographie entre les gouvernements de l’Inde et Maurice, sept études hydrographiques ont été menées par la marine indienne, ce qui représente plus de 200 jours d’opérations d’enquête dans les zones maritimes de Maurice. Ainsi, conformément au protocole d’accord, les navires INS Nirdekshak et INS Sarvekshak mènent des études hydrographiques sur une base annuelle dans les eaux mauriciennes. En 2010, des données relatives aux études bathymétriques réalisées par l’INS Nirdeshak ont été remises au gouvernement de Maurice. Ces relevés ont aidé le gouvernement de Maurice à renforcer sa réclamation du plateau continental prolongé au-delà de la ZEE, en commun avec les Seychelles. En mai 2020, le MGS Sagar, un bateau de recherche était dans les eaux mauriciennes pour réaliser des études hydrographiques dans notre zone. Des officiers du Mauritius Oceanography Institute, l’Hydrography Service et du département du plateau continental se trouvaient à bord avec ceux du National Centre for Polar and Ocean Research (NCPOR) qui tombe sous l’égide du Ministry of Earth Sciences, du gouvernement indien.

L’autre avantage non négligeable concerne les relations étroites entre Maurice et l’Inde. Cette dernière à travers le «G to G» a financé plusieurs projets d’infrastructures à Maurice comme le Metro Express. 

Du coup, pour certains observateurs, la Grande péninsule, en toute logique, fera probablement partie de l’exploration des fonds marins à la recherche de pétrole ou autre minéraux.

Source: lexpress.mu