La beauté fascinante du plancton, sous l’objectif de la science participative
23 décembre 2022
23 décembre 2022
La beauté des organismes marins sous la lumière du microscope : c’est l’un des aspects qui a le plus frappé les usagers de la mer – plaisanciers, pêcheurs et sauveteurs – impliqués dans le programme de science participative « Objectif Plancton ». Mais de quoi s’agit-il, et pourquoi est-ce si fascinant ?
Qu’est-ce qui produit la moitié de l’oxygène de l’air que nous respirons ? La réponse peut surprendre. Avant même la forêt amazonienne, souvent qualifiée de « poumon vert », c’est d’abord le « poumon bleu » des océans qui assure notre survie. Un « poumon » plus précisément composé d’organismes qui flottent et qui dérivent avec les courants marins : le plancton (du grec planktos signifiant ‘errer’).
Comme si cela ne suffisait pas d’enrichir l’atmosphère en O2, le plancton constitue également une source… de plaisir pour les yeux. C’est en tout cas ce que soulignent un certain nombre d’usagers de la mer, impliqués dans le programme de science participative « Objectif Plancton » – organisé par l’Océanopolis à Brest en partenariat avec l’Ifremer, l’Institut universitaire européen de la mer, l’université de Bretagne Occidentale, Sorbonne Université et la Station marine de Concarneau (MNHN).
Si le plancton – qui représente 95 % de la biomasse terrestre – est certes en grande partie invisible à l’oeil nu, les organisateurs d’Objectif Plancton s’assurent que les participants puissent admirer le « trésor » qu’ils ont remonté dans leurs filets lors de leur sortie en mer. Pour cela, avant même qu’une étude basée sur leurs données ne figure dans une revue scientifique, ces derniers se donnent rendez-vous avec les animateurs et les chercheurs autour d’un microscope relié à un projecteur afin d’observer, ensemble, le petit monde fascinant des microorganismes marins.
Algues microscopiques et larves de poissons, mais aussi bactéries, méduses et autres cellules reproductrices… Le plancton observé sous la loupe du microscope, c’est la biodiversité – la diversité des gènes, des espèces et des écosystèmes – incarnée dans toute sa splendeur. Tels les personnages d’un tableau, voici une liste de quelques organismes qui constituent le plancton :
D’autres organismes planctoniques sont, en revanche, visibles à l’œil nu. C’est le cas notamment des crevettes, de l’hippocampe – un poisson à l’allure de petit cheval (hippos, en grec) dont le mâle porte les oeufs jusqu’à l’éclosion, et bien sûr, des méduses, dont les cellules urticantes (les cnidoblastes) peuvent s’avérer soit inoffensives soit au contraire dangereuses pour l’humain, selon les espèces. Tous les autres, plus gros, ne sont pas considérés comme du plancton car leur taille – associée à leur mobilité – rend leur déplacement volontaire plus significatif que le fait d’être simplement porté par le courant.
La mer est également le lieu où plusieurs éléments venus de la terre ferme viennent terminer leur course. Par exemple, du pollen de fleur, mais aussi malheureusement, des microplastiques. Ces fragments de plastique invisibles à l’oeil nu peuvent être soit issus de la dégradation de fragments plus gros, soit minuscules dès leur fabrication – à l’instar des microbilles de certains gels douches exfoliants. Les équipes d’Objectif Plancton en retrouvent « toute l’année dans les prélèvements« .
En rade de Brest, en baie de Concarneau et en rade de Lorient, trois fois par an (avril, juin et septembre), des plaisanciers, des marins pêcheurs, des conchyliculteurs ainsi que des sauveteurs en mer de la SNSM se livrent à une activité un peu spéciale. A bord de leur navire, accompagnés d’étudiants en biologie marine, ils partent recueillir du plancton à l’aide du matériel qui leur est fourni – composé d’un tube collecteur, de différents types de filets, de bidons et de flacons, ou encore, de solvants et d’une glacière isotherme pour conserver les prélèvements jusqu’à leur retour.
Le programme Objectif Plancton est accessible à toute personne possédant un navire, quelle qu’en soit la taille. « Le matériel a été conçu par nos soins pour être facilement transportable et manipulable même sur un petit navire« , confie ainsi Céline Liret, Directrice scientifique d’Océanopolis et responsable de ce programme, à l’occasion d’une conférence de presse (7/12). « Il n’y a pas de prérequis (…) juste d’avoir un bateau, d’aimer la navigation et d’avoir un intérêt pour la vie de l’océan« , confirme à GEO.fr Philippe Pondaven, Maître de Conférences à l’Université de Bretagne Occidentale.
Si les précieux échantillons permettent aux chercheurs d’étudier la diversité, la structuration et les dynamiques des communautés planctoniques côtières – « pourquoi une espèce et pas une autre est-elle présente à un certain endroit et à une certaine période de l’année ? » – mais également d’identifier de nouvelles espèces d’ichtyoplancton (larves de poissons), l’effet collatéral des projets de science participative est souvent le même, à savoir : la sensibilisation des non-scientifiques.
« Rien n’est minuscule pour qui sait regarder« , lance devant un public attentif le médecin et explorateur Jean-Louis Etienne, citant le poète Christian Bobin. « La science participative permet d’émouvoir à travers ce que l’on voit ; c’est une transcendance avec la nature. C’est le fait d’essayer de s’approprier, personnellement, ce mystère des choses que l’on ne voit jamais. » Et si les zoé, striatella et dinophycées n’attendaient qu’un regard à travers un microscope pour vous toucher en plein cœur ?
Source: GEO