Environnement : Des chercheurs français révolutionnent l’alimentation des poissons d’élevage
31 octobre 2022
31 octobre 2022
L’institut national de la recherche agronomique (INRAE) a publié une étude pour réduire l’impact environnemental de l’alimentation de la truite arc-en-ciel, un poisson d’élevage. La filière est enthousiasmée par cette recette éco-responsable et moins chère.
Comment réduire l’impact environnemental de l’alimentation des poissons d’élevage ? Voilà les questions auxquelles ont tenté de répondre des chercheurs de l’INRAE. Et euréka : ils ont créé une formule pour réduire l’impact environnemental des aliments sans alourdir la facture. Les chercheurs se sont penchés sur l’alimentation des truites arc-en-ciel, une espèce emblématique de poissons d’élevage. La France en produit 35.000 tonnes chaque année. Ces truites sont nourries avec des huiles et des farines de poisson, qui représentent 20% de leur alimentation. Ces produits sont issus de « poissons pêchés dans le milieu naturel, souvent de l’anchois du Pérou et des sardinelles », précise Sandrine Skiba, spécialiste de la nutrition des poissons à l’INRAE. « Ces poissons sont précieux. Mais l’aquaculture se développe à un rythme très rapide : à un moment, on risque de manquer d’huiles et de farines pour la nutrition des poissons », prévient-elle. Il faut donc trouver des aliments qui ne vont pas puiser dans cette biodiversité fragile. Il s’agit de calculer le coût écologique comme économique pour les aquaculteurs, et les contraintes nutritionnelles sont nombreuses. La recette originale, riche de plus de 20 composants, est « très compliquée », poursuit Sandrine Skiba. « Les aliments pour poissons contiennent 40% de protéines, alors que c’est 15% chez les porcs et les volailles ».
La recette idéale pour nourrir les poissons n’est donc pas de la cuisine mais des mathématiques. La formule magique a été trouvée par Aurélie Wilfart. Cette ingénieure de recherche à l’INRAE a mobilisé des grands tableaux de calcul dans lequel chacun des ingrédients est caractérisé et détaillé. « L’idée est de couvrir les besoins en assurant un impact environnemental faible. Par exemple, un kilogramme de blé va produire telle quantité de CO2, telles molécules acidifiantes pour les milieux et tant d’énergie totale », explique-t-elle. Les grands gagnants de ces éco-aliments sont les co-produits, c’est-à-dire tous les déchets alimentaires qui peuvent être valorisés. C’est par exemple le cas des plumes de volailles, qui peuvent être transformées en farine riche en protéines. Cerise sur le gâteau : cette formule éco-responsable est 8% moins chère, « ce qui n’est pas négligeable », se réjouit Aurélie Wilfart. « On réduit notre consommation d’eau de 40%, on est gagnant sur l’utilisation de surfaces, sur l’énergie dépensée mais aussi au niveau de l’impact sur le changement climatique« . En tout, c’est seulement 40% d’huile et de farines de poissons qui sont nécessaires à cette nouvelle formule. Le soja a aussi disparu de la recette. La filière de l’aquaculture a déjà manifesté son intérêt pour produire cet « éco-aliment » à échelle industrielle. Les deux chercheuses veulent désormais s’atteler à trouver la formule magique pour d’autres espèces de poissons.