Après avoir nagé 1 km dans l’Antarctique, Marion Joffle a d’autres défis en tête

 

 

Marion Joffle a nagé 1 km dans les eaux glacées de l’Antarctique, fin-février 2024. La nageuse caennaise est prête à relever d’autres défis. 

Originaire de Lisieux (Calvados), Marion Joffle a nagé 1 km dans les eaux glacées de l’Antarctique, fin-février 2024. Avec ce nouvel exploit, la nageuse caennaise de 25 ans entre dans un cercle très fermé. 

Le 16 février, vous avez traversé à la nage le Beagle Channel, le détroit qui sépare l’Argentine et le Chili. Qu’est-ce qui vous a poussé à vous lancer dans cette aventure ? 

Nous sommes partis du Chili tôt le matin, nous avions 1 700 m à parcourir à la nage, dans une eau aux alentours de 8 degrés. Nous sommes arrivés sur l’île de la Tierra del fuego une demi-heure plus tard. Nous l’avons fait en groupe, pour des questions de sécurité. C’était très encadré, d’un côté par la police chilienne, et de l’autre par la police argentine. 

Cette aventure était organisée par l’association d’ice swimming, et je m’y suis greffée. C’était le moment pour moi de tenter une nouvelle chose, une nouvelle expérience en amont de l’Antarctique. 

En effet, deux jours après, vous êtes partie en Antarctique pour un nouveau défi : y nager 1 km. Comment l’avez-vous préparé ? 

Je ne me suis pas beaucoup préparée, parce que j’ai vécu une année 2023 assez compliquée. J’ai dû retrouver des moyens de m’entraîner et de la motivation. Je ne m’étais pas du tout remise en eau froide depuis le mois de septembre, donc j’y suis allée en faisant totalement confiance à mon corps. J’étais vraiment partie dans l’optique de me faire plaisir et de retrouver les sensations que je pensais avoir perdues. 

Le 22 février, nous avions un test de natation obligatoire à réaliser : il fallait nager 200 mètres en-dessous du cercle polaire Antarctique. Pour moi, c’était un test important. L’eau était négative, donc j’ai eu un peu d’appréhension par rapport à ce que j’avais vécu à Svalbard (en Norvège, ndlr) : en mai 2022, j’avais tenté le Ice Mile en Arctique, dans de l’eau à -1° et avec -17° à l’extérieur. J’étais sortie de l’eau au bout de 1 550 m, sur les 1 609 m à parcourir. J’avais perdu conscience : mon corps était toujours en mouvement, mais je n’étais plus lucide du tout…

Donc je me souvenais du côté dangereux de l’épreuve. J’avais forcément de l’appréhension avant de sauter à l’eau dans l’Antarctique. Cette fois-ci, il ne faisait pas -17°, mais entre -2 et -3°, et -0,5° dans l’eau, ce qui m’a un peu soulagée. Le test m’a un peu rassurée, mais j’étais aussi un peu perturbée : nous n’avions fait que 200 m, donc je savais qu’il faudrait faire ça encore quatre fois pour atteindre les 1 000 m !

Finalement, comment s’est passée l’épreuve, deux jours plus tard ? 

Je ne me suis pas trop posé de questions, j’ai essayé de me détendre au maximum. Nous sommes remontés au niveau Port Lockroy, une base britannique, pour faire le km. L’eau était à 1°, il faisait 2° à l’extérieur, donc tout s’est très bien passé. 

J’ai vraiment apprécié chaque instant de la nage, chaque coup de bras. J’étais calme, sereine. J’ai vraiment aimé les paysages, tout ce décor blanc : j’ai nagé dans un cadre idyllique. 

L’après, qu’on appelle la post-nage, est le plus dangereux, car on continue à descendre en température : même ça, je l’ai très bien vécu. Tout était parfait pour moi !

Grâce à cet exploit, vous rejoignez un club très sélect, celui des « Both Polars Ice Swim », les personnes qui ont nagé au moins 1 km dans les pôles Arctique et Antarctique. Qu’est-ce que cela vous fait ? 

Nous sommes douze à l’avoir fait. C’est flatteur, je suis la deuxième femme au monde à réaliser cet exploit, je rentre dans un cercle très fermé. C’est beaucoup de joie, parce que cela représente beaucoup d’investissement, de temps, de sacrifices… Mais aussi beaucoup de plaisir ! Je me dis qu’à 25 ans, j’ai déjà réalisé de très belles choses, et je n’en suis qu’au tout début !

Quels seront vos prochains défis ? 

J’aimerais bien partir de nouveau en Argentine, mais cette fois-ci en saison hivernale, en juillet ou août, pour réaliser un Ice Mile Amérique du Sud. Et j’aimerais aussi, si c’est possible, partir au Québec en novembre, décembre, ou après, en fonction de la météo, pour réaliser mon Ice Mile Amérique du Nord. 

Sur tous les continents

Marion Joffle a toujours son projet fou en tête : réaliser sept Ice Mile, un dans chaque continent et dans un des deux cercles polaires. Un Ice Mile consiste à « nager 1 609 m dans une eau en-dessous de 5°, en maillot de bain », résume celle dont le surnom est « Le Pingouin souriant ». Elle en a pour l’instant réalisé deux, en Europe (Autriche) et en Afrique (Maroc). Prochains objectifs : l’Amérique du Nord (Québec) et l’Amérique du Sud (Argentine). 
Les prochains mois devraient être bien remplis pour la licenciée de l’Entente Nautique Caennaise et du Caen Triathlon, qui poursuit ses études en parallèle de tous ces défis : « Je termine mon BTS en alternance en relation client, et j’envisage de faire un bachelor en communication l’année prochaine. » 

Subissez-vous les effets du réchauffement climatique ? Est-ce plus compliqué de trouver des eaux en-dessous de 5 degrés ? 

Ce n’est pas que c’est plus dur, c’est que c’est plus aléatoire. On peut en trouver, mais parfois pas à la période envisagée. Par exemple, je suis allée en Mongolie en octobre (pour tenter un Ice Mile, ndlr), et on a ressenti un décalage. L’eau était à 8°. Normalement, à cette période, elle est censée être plus proche de 3-4 degrés. On a quand même nagé, on a profité du cadre, et ça m’a fait de petites vacances.

Mais il faut réorganiser une épreuve en Asie. Ce qui est dur, c’est toute la logistique mise en place pour finalement se rendre compte que ce n’est pas possible. C’est la nature, il faut respecter ça. Malheureusement, plus on va avancer, et plus ça risque d’être difficile de pratiquer mon sport. Ou il faudra aller dans des zones très précises. 

Source: actu fr