Les mirusvirus, nouveaux virus découverts dans les océans

 
En explorant les données issues des expéditions de la fondation Tara Océan, des scientifiques ont découvert un nouveau type de virus : les mirusvirus. Cette trouvaille pourrait permettre de comprendre d’où vient l’herpès et de mieux appréhender la biodiversité océanique.

D’étranges virus peuplent en abondance les océans. De probables cousins lointains du virus de l’herpès ont été découverts grâce aux données récoltées par une expédition de la goélette scientifique Tara Océan, selon une étude parue ce mercredi 19 avril. Baptisés mirusvirus («mirus» signifie «étrange» en latin), ces virus à ADN sont présents partout à la surface des mers et océans, de l’équateur jusqu’aux pôles, où ils infectent le plancton. «Ce sont des virus chimériques, à mi-chemin entre les virus géants, également abondants dans les océans où ils n’infectent que des organismes unicellulaires, et le virus de l’herpès, qui lui n’infecte que les animaux, dont les humains», décrit le biologiste Tom Delmont, chercheur au CNRS et auteur de l’étude publiée dans Nature.

La découverte, inattendue, a été faite au Genoscope d’Evry (Essonne), où sont séquencés les génomes récoltés par la fondation Tara Océan. «On était en train d’explorer le tsunami de données issues de l’expédition de 2009-2013, avec 300 milliards de séquences d’ADN, quand on est tombés sur un signal évolutif inhabituel», raconte le spécialiste de l’écologie microbienne. Le signal d’un gène marqueur porté par les virus géants, mais aussi par les mirusvirus. «C’était comme si on avait trouvé un trésor sur une immense plage de sable avec un détecteur de métaux», poursuit le chercheur. Après plusieurs années d’analyse, les scientifiques du consortium Tara Océan et leurs collaborateurs ont pu caractériser ce nouveau groupe de virus, très complexes et divers.

Une présence naturelle et bénéfique

La découverte va permettre de mieux appréhender la biodiversité océanique et l’importance des virus dans ces écosystèmes. «On ne voit les virus que comme des maladies, mais leur présence dans les océans est naturelle et bénéfique – un peu comme notre microbiote intestinal», selon Tom Delmont. «En infectant les cellules, ils les détruisent et cela remet des nutriments dans l’écosystème. Ce qui permet un renouvellement de l’activité du plancton», développe le biologiste.

Ces virus ont également une histoire évolutive étonnante car la composition particulière de leur génome suggère qu’il s’agit de «cousins lointains» de l’herpès. Les virus de l’herpès sont très répandus chez les animaux et infectent plus de la moitié de la population humaine mondiale. Mais ils sont complètement absents des organismes unicellulaires marins. «L’énigme pourrait être clarifiée ainsi : grâce aux mirusvirus, on imagine ce que pouvait être l’ancêtre océanique de l’herpès. Cet ancêtre aurait infecté des organismes unicellulaires dans les océans il y a des millions d’années, avant de se spécialiser dans l’infection des animaux», explique Tom Delmont.

Source: Libération