Le sol d’une villa romaine de luxe découvert dans les fonds marins au large de Naples
31 juillet 2024
31 juillet 2024
Un parc sous-marin en Italie révèle d’incroyables mosaïques antiques, qui témoignent de l’opulence de la station balnéaire romaine de Baiae, engloutie par un phénomène géologique.
Dans la baie de Naples, en Italie, le parc archéologique sous-marin de Baia préserve les ruines submergées de l’ancienne ville thermale romaine de Baïes ou Baiae, en latin. Autrefois luxueuse station balnéaire pour les élites romaines, la région a partiellement sombré sous les eaux à partir du IVe siècle apr. J.-C., en raison de l’activité volcanique et des phénomènes bradyséismiques des Champs Phlégréens – au cours duquel le sol s’élève ou, comme dans ce cas, s’affaisse en raison des mouvements lents et verticaux de la croûte terrestre.
Aujourd’hui, le parc de Baia offre une expérience unique, où les visiteurs peuvent observer les vestiges très bien conservés des antiques habitations, thermes et rues à travers des plongées ou des excursions en bateau à fond de verre. Mais les lieux revêtent avant tout une importance scientifique et historique. Les archéologues continuent d’y faire d’incroyables trouvailles, en témoigne la récente annonce du Parc archéologique de Campi Flegrei, publiée sur Facebook le 23 juillet 2024, à propos de la découverte de sublimes mosaïques d’une ancienne villa.
Baiae, autrefois célèbre ville thermale romaine, était réputée pour ses sources naturelles et ses paysages pittoresques. Elle attirait ainsi les élites romaines – voire les empereurs, de Jules César à Néron – qui y construisirent des villas et bains luxueux. Synonyme de faste, de détente et de plaisir, la cité devint un lieu de villégiature prisé pour les puissants de Rome, un centre social et culturel où se mêlaient intrigues politiques, fêtes somptueuses et vie de cour.
Les mosaïques nouvellement décelées illustrent cette opulence et cette sophistication. Si elles se trouvent désormais sous l’eau, elles décoraient jadis une résidence surplombant la mer. Elles faisaient plus précisément le sol d’une salle de réception de plus de 250 mètres carrés, près de l’entrée principale et de son protiro, un porche décoré. Cette grande pièce appelée « basilique » par les spécialistes, est typique des demeures seigneuriales de la fin du IIIe siècle apr. J.-C., où de grandes salles ont remplacé les plus petites déjà existantes dans les maisons.
Des milliers de plaques avec des centaines de formes différentes ont été réunies pour créer une géométrie complexe – dans une opération sûrement coûteuse pour l’ancien propriétaire de la villa. Les marbres utilisés sont très irréguliers. Pour cause, les résultats préliminaires ont révélé qu’ils ont été réutilisés ; ils servaient auparavant à la décoration d’autres sols et murs. La technique, appelée opus sectile, était courante dans l’Antiquité tardive (IIIe-Ve siècle apr. J.-C.).
Cela explique en partie que des fragments des mosaïques soient brisés. En outre, les anciens murs de la salle, qui dépassaient les 10 mètres de hauteur, se sont également effondrés directement sur le sol. Des travaux sous-marins sont en cours pour restaurer l’œuvre et en révéler d’autres parties. Comme mentionné dans la publication, il s’agit d’un « nouveau défi très compliqué en raison de la nature extrêmement fragmentaire des vestiges et de leur vaste étendue ».
Des dalles ont été retirées et ramenées sur la terre ferme, où elles ont été immergées dans des cuves d’eau douce pour en éliminer le sel. L’objectif est de tenter de réassembler un module complet du sol antique. « Le travail est encore long et complexe, mais nous sommes convaincus qu’il offrira de nombreuses perspectives et une grande satisfaction », soulignent les chercheurs.
Le maire local de Bacoli, Josi Gerardo Della Ragione, a qualifié cette découverte de « stupéfiante ». Le sol de marbre aurait été posé vers la fin de l’Empire romain, « peu avant que le bradyséisme n’apporte ces merveilles au fond de la mer », a-t-il déclaré. Car sous la baie de Naples et les îles de Capri et Ischia, la vaste zone volcanique des Champs Phlégréens (« champs brûlants » en grec) s’étend sur 200 kilomètres. Et outre les activités géothermiques, exploitées par les Romains en leur temps, le phénomène géologique du bradyséisme y est particulièrement notable.
En raison des déplacements lents du magma sous la surface, la région subit régulièrement des variations du sol (soulèvements et des affaissements) qui peuvent modifier drastiquement le paysage. Entre 1968 et 1984, par exemple, la ville de Pouzzoles (Pozzuoli) a connu un soulèvement de plusieurs mètres, entraînant des dégâts significatifs. De même, ce sont plusieurs vagues de ces phénomènes bradysismiques qui ont progressivement submergé sous les eaux une partie de la ville de Baiae… et ses trésors antiques, désormais protégés.