Le mont La Pérouse, une mystérieuse montagne sous-marine au cœur d’une expédition inédite

 

Une équipe de scientifiques et de plongeurs sont partis mener une expédition à près de 200 km de La Réunion pour explorer un mystérieux et immense relief sous-marin. Le mont La Pérouse est caché à 60 m sous la surface et s’étend sur pas moins de 5.000 m de haut pour 12 km de large.

« On est un peu comme des alpinistes qui commencent l’ascension d’une montagne par le sommet« , explique Laurent Ballesta. A l’automne 2019, le naturaliste et plongeur a rejoint une équipe scientifique pour participer à une expédition de dix jours dans l’océan Indien, à près de 200 kilomètres de La Réunion.

La mission visait à éclairer une énigme sous-marine, celle du mont La Pérouse. Sous ce nom, se cache un relief dont il est difficile de discerner les contours sans s’aventurer dans les profondeurs. Sa taille est pourtant colossale. Il démarre à 60 mètres sous la surface pour descendre jusqu’à 5.000 mètres plus bas, totalisant ainsi une hauteur supérieure à celle du mont Blanc.

Si son sommet est relativement plat, il s’étire sur pas moins de douze kilomètres. « Imaginez un tel obstacle au milieu de l’océan, c’est une montagne énorme », appuie Patrick Durville, biologiste marin et ichtyologue spécialiste des poissons coralliens. C’est lui qui a attiré l’attention de ses collègues sur le mont La Pérouse et initié l’expédition à bord du navire La Curieuse.

Cette aventure est retracée dans un documentaire, Les mystères du mont La Pérouse, réalisé par Yann Rineau et diffusé il y a quelques semaines à Pariscience, le festival international du film scientifique. La projection publique était suivie d’une discussion avec Patrick Durville et Laurent Ballesta.

« Personne n’avait encore plongé sur ce mont »

Grâce aux nouvelles technologies, on sait désormais que les fonds marins ne sont pas dénués de reliefs comme on le pensait autrefois. Ils sont jalonnés de vallées, de fosses, de canyons et aussi de centaines de milliers de monts. Celui de La Pérouse en est un exemple spectaculaire. Personne ne semblait pourtant s’y être vraiment intéressé jusque-là. Ou presque.

« L’endroit est connu des pêcheurs de La Réunion sous le nom de banc des 90.000« , précise Patrick Durville. Mais « c’est un endroit vraiment compliqué. Il est difficile d’accès, très isolé, il est animé par de grosses vagues et balayé par des vents forts » donc « personne n’avait encore plongé sur ce mont, ni mené d’étude, ni même décrit ce mont sous-marin ».

La taille de ce relief n’est pas le seul élément qui intriguait les spécialistes. En menant des recherches, le biologiste a retrouvé des cartes faisant mention d’une île nommée Santa Apolonia, montrant une forme et une localisation similaire à celui du mont La Pérouse. Ce dernier pourrait-il avoir été une île il y a seulement trois siècles ?

L’expédition était l’occasion d’en avoir le cœur net, en plus d’en apprendre davantage sur l’écosystème de ce mont et son origine géologique. L’équipe n’a pas été déçue. En dix jours, Laurent Ballesta et ses compères ont pu réaliser neuf plongées, entre 60 et 140 mètres de profondeur, dont ils ont ramené des centaines de photos et de nombreux échantillons.

Des espèces et des habitats très différents

Des observations qui ont révélé un écosystème inattendu. « Ce qui m’a surpris c’est que c’était très différent de ce qu’on peut trouver à La Réunion », confie l’ichtyologue. « C’est une île engloutie mais qui n’est pas loin du tout. Donc on aurait pu s’attendre aux mêmes paysages, aux mêmes habitats, aux mêmes espèces« .