Le long chemin du traité zéro plastique

 

 Un camion poubelle de déchets plastiques est déversé dans les océans chaque minute. Pour les participants au Forum économique mondial (WEF) de Davos, qui s’est terminé hier, la solution passe par la collaboration. La spécialiste du sujet auprès du cabinet de conseil en développement durable Quantis, Laura Peano, abonde: «Il faut agir ensemble. Un acteur ne résoudra pas tout seul ce problème.» Plus largement, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a indiqué dans la station grisonne vouloir mettre sur pied un règlement pour une industrie à zéro émission.

Le président de la Confédération, Alain Berset, a lui promis que la Suisse s’engagerait en faveur du traité international contre la pollution plastique. La Suisse souhaiterait accueillir à Genève le secrétariat général de cette initiative sous l’égide des Nations Unies. Un geste salué par Laura Peano: «C’est clairement une action qui apporte une grande valeur ajoutée. Les pays doivent aussi collaborer.»

 

Accélérer le mouvement

 

Discuté depuis mars dernier, ce traité ne devrait cependant pas voir le jour avant plusieurs années, du fait de plusieurs divergences. Une coalition de pays, dont l’Union européenne (UE), défend le principe d’un accord juridiquement contraignant, alors que les Etats-Unis ne veulent pas en entendre parler. Autre point de discorde: certains gouvernements, à l’instar de celui du Japon, souhaitent que ce texte ne s’applique qu’à la pollution marine et non terrestre. Quatre cycles de négociations seront organisés ces prochains mois. Une réunion finale pour l’adoption du traité se tiendra au plus tôt en 2025.

Aux yeux de Laura Peano, les mesures politiques contre ce fléau doivent s’accélérer. «Nous discutons du réchauffement climatique depuis trente ans. Dans ce domaine, il y a fort heureusement des actions concrètes. Mais nous ne parlons de pollution plastique que depuis trois ans», fait-elle remarquer.

A l’heure où plusieurs pays dont la Suisse s’engagent à mettre fin à cette problématique d’ici à 2040, Laura Peano juge cet objectif irréaliste du fait des montagnes de plastique. En l’espace de vingt ans, la production mondiale de ce matériau a doublé à 460 millions de tonnes. A cela s’ajoutent les milliards de tonnes présentes dans la nature.

 

Alternatives recherchées

 

Seuls 9% de ces déchets sont recyclés à l’échelle globale. Pour la Tessinoise, ce processus reste complexe. «Le recyclage n’est donc pas la solution, estime-t-elle. Tous les plastiques ne peuvent pas être revalorisés.» Et parfois même le PET ne peut l’être, s’il entre en contact avec de l’huile par exemple. «La forme et la couleur du récipient en plastique influencent aussi le recyclage», précise l’experte. A cet effet, Quantis collabore notamment avec l’industrie cosmétique pour lui fournir des conseils en matière d’emballages.

Selon la spécialiste, les alternatives au plastique ne sont pas légion. Et les contenants à base de maïs et de canne à sucre biodégradables produisent aussi du CO2 pour leur culture. Il faut prendre en considération l’ensemble du cycle de vie d’un emballage. Un avis partagé par l’association Zerowaste pour qui utiliser des terres agricoles pour reproduire et maintenir une économie du jetable s’avère aberrant. Cela encourage les monocultures intensives, nuit à la biodiversité et pollue au final. Confondus avec du vrai plastique, les bioplastiques peuvent par ailleurs être mal triés et dégrader le recyclage du plastique.

En attendant de réelles solutions, différentes formes de collaborations sont mises sur pied entre les secteurs public et privé. Au Ghana, par exemple, un groupe de plus de 2000 travailleurs du géant technologique SAP récoltent des déchets et autres immondices sur la voie publique. L’Inde a été encore plus loin en imposant des obligations de recyclage aux industriels. Rien de tel ici en Suisse, où les pouvoirs publics restent responsables de la collecte et du tri du plastique. 

Source: La liberté