Le littoral belge se barricade contre la mer

Des solutions naturelles sont développées pour résister à la montée des eaux sans nuire au tourisme si précieux.

En novembre dernier, le glaciologue flamand Jonas Van Breedam a évalué le risque pour la Flandre et d’autres régions d’Allemagne, des Pays-Bas et du Danemark de se retrouver à plus ou moins long terme sous eau. Dans une étude, il a mesuré l’impact qu’auront différents niveaux d’émissions de gaz à effet de serre sur le littoral de ces pays. Et le moins que l’on puisse écrire est qu’il est fortement menacé.

Le scénario le plus extrême prévoit que le niveau de la mer augmentera d’un mètre par siècle en moyenne sur les 2.000 ans à venir. A l’inverse, avec des émissions de gaz à effet de serre réduites, le rythme de l’élévation serait presque 10 fois plus faible sur la même période : 11 centimètres par siècle.

«Cette étude montre que l’effet du réchauffement climatique actuel sur le niveau de la mer restera visible pendant des milliers d’années. Si nous ne parvenons pas rapidement à réduire à zéro les émissions de CO2, la Flandre, à l’exception d’une petite partie du Limbourg, se retrouvera complètement sous le niveau de la mer», a commenté Jonas Van Breedam.

Les moules à la rescousse

Cette problématique est prise très au sérieux par les gestionnaires du littoral belge, qui passe pour le plus vulnérable d’Europe après les Pays-Bas. La digue et ses masses de béton ne suffiront bientôt plus pour protéger de la montée des eaux la Flandre dont 15% du territoire n’excèdent pas une hauteur de 5 mètres par rapport au niveau de la mer.

Différentes solutions sont envisagées. Certaines ont de quoi réconcilier les défenseurs de l’environnement fâchés avec les barres d’immeubles qui dénaturent la plupart des stations balnéaires belges.

Le journal L’Echo évoque ainsi le recours à l’aquaculture pour construire des récifs biogéniques. Pour résumer, des moules se développent sur un maillage de cordages biodégradables, les cordages finissent par se déliter dans l’eau de mer et les mollusques tombent sur le fond marin où ils forment un récif capable de maintenir le sable en place. Cette technique intéresse, assurent ses concepteurs, Venise menacée par la montée des eaux.

Eviter une montée de 30 cm

«Coastbusters» est le nom du projet qui reprend cette technique de récif biogénique. On retrouve parmi ses chevilles ouvrières de grandes sociétés flamandes spécialisées dans les travaux marins (Jan De Nul, Deme…) ainsi que différents niveaux de pouvoirs publics et d’expertises scientifiques. «Coastbusters fait partie d’une réflexion globale menée par la Flandre pour protéger l’avenir de la côte, en explorant des solutions innovantes», explique L’Echo. Il n’y a plus de temps à perdre. Des projections établissent qu’entre 2000 et 2050, le niveau de la mer aura monté de 30 cm.

En 2011, un «Plan directeur de sécurité côtière» a été mis en place, avec un budget de 300 millions d’euros. Il passe notamment par une technique dite de «rechargement» qui consiste à ajouter du sable pour allonger les plages et tenir la mer à distance. Des murs anti-tempête peuvent être ajoutés qui apportent une protection supplémentaire contre le sable et l’eau. Parmi les autres solutions naturelles évoquées, il est aussi question de dunes rivées au littoral par des oyats, de «digues d’herbes» ou d’ajout de sable sur l’estran – la partie de la côte où alternent les marées.

L’objectif final est de faire barrage à la montée des eaux sans rendre plus difficile le travail des pêcheurs et sans nuire au tourisme. Celui-ci génère chaque année un chiffre d’affaires de 2,8 milliards d’euros, dont 1 milliard durant les vacances d’été.

Source : Luxemburger Wort