L’Arctique pourrait être privé de banquise en été dès les années 2030
9 juin 2023
9 juin 2023
Les chercheurs estiment que le déclin de cette glace peut être attribué essentiellement aux émissions de gaz à effet de serre.
L’Arctique pourrait être privé de banquise en été dès les années 2030, soit bien plus tôt qu’estimé jusqu’à présent, même dans un scénario de faibles émissions de gaz à effet de serre, affirment des chercheurs dans un article publié mardi 6 juin.
Les scientifiques, basés en Corée, au Canada et en Allemagne, ont utilisé des données d’observation sur la période 1979-2019 pour effectuer des nouvelles simulations. « Les résultats indiquent que le premier mois de septembre sans glace de mer interviendra dès les années 2030-2050, quels que soient les scénarios d’émissions », concluent-ils dans la revue Nature Communications.
Lorsque les experts évoquent l’absence de banquise, cela correspond à une surface inférieure à 1 million de kilomètres carrés ; il pourra toujours rester de la glace résiduelle le long des côtes. A titre de comparaison, la surface de la banquise a oscillé entre 10 et 14 millions de kilomètres carrés en 2022, selon le National Snow and Ice Data Center (NSIDC), un institut universitaire américain spécialisé dans l’étude des régions recouvertes par les glaces
« C’est environ une décennie plus tôt que les récentes projections du GIEC », le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, mandaté par l’ONU, souligne le coauteur de l’article Seung-Ki Min, des universités sud-coréennes de Pohang et Yonsei.
Les savants estiment aussi que le déclin de cette glace peut être attribué essentiellement aux émissions de gaz à effet de serre, les autres facteurs (aérosols, activité solaire et volcanique notamment) étant bien moins importants.
La banquise – ou glace de mer – est faite d’eau salée à la surface d’un océan, qui a gelé sous l’effet du froid. Sa fonte ne cause pas directement d’élévation du niveau des océans (contrairement à celle de la calotte glaciaire et des glaciers), puisque son volume fait déjà partie de l’océan liquide mais a malgré tout des conséquences néfastes.
En effet, cette glace joue un rôle très important en été, en reflétant dans l’espace les rayons du Soleil, ce qui permet de rafraîchir l’Arctique. Cet effet de miroir, appelé albédo, est aujourd’hui de plus en plus faible, et l’Arctique se réchauffe donc beaucoup plus vite que d’autres régions.
La disparition de la glace « accélérera le réchauffement arctique, ce qui peut augmenter les événements météorologiques extrêmes aux latitudes moyennes, comme les canicules et les feux de forêts », explique Seung-Ki Min, des universités sud-coréennes de Pohang et Yonsei, coauteur de l’article. « Cela peut aussi accélérer le réchauffement mondial, en faisant fondre le pergélisol (les sols qui restent gelés toute l’année), ainsi que la montée du niveau des océans en faisant fondre la calotte glaciaire du Groenland », ajoute le chercheur.
« Ce sera le premier composant majeur de notre système climatique que nous perdons à cause de nos émissions de gaz à effet de serre », complète Dirk Notz, de l’université de Hambourg, un autre coauteur de l’étude. « Les scientifiques ont alerté sur cette disparition pendant des décennies, et c’est triste de voir que ces mises en garde n’ont, pour l’essentiel, pas été écoutées », regrette-t-il.
M. Notz espère maintenant que les décideurs politiques prêteront attention aux conclusions des chercheurs « pour qu’on puisse au moins protéger les autres composants de notre système climatique, en limitant le réchauffement futur autant que possible ».