La recherche scientifique, le courage d’agir et une vision commune pour sauver les océans
27 juin 2025
27 juin 2025
La déclaration de la ministre de l’Environnement Mme Tamara Elzein à la troisième Conférence des Nations unies sur les océans UNOC3 qui s’est tenue à Nice, France.
« Homme libre, toujours tu chériras la mer !
La mer est ton miroir ; tu contemples ton âme… »
Miroir de l’âme pour Baudelaire, la mer est aujourd’hui le miroir de nos funestes excès.
Réchauffement, incertitudes sur la circulation thermohaline, surexploitation, déplétion des ressources halieutiques, dégradation de la biodiversité, pollutions de toutes sortes, microplastiques, la liste est longue des menaces qui pèsent sur notre avenir.
L’océan sera-t-il encore demain le creuset d’où jaillit la vie ?
Cette incertitude doit nous hanter.
Restaurer le pouvoir nourricier et l’équilibre de nos océans est de notre responsabilité, et nous le devons à nos enfants.
Venant du Liban, je représente un pays méditerranéen qui a pu montrer que même en état de faillite et de submersion, le sursaut est toujours possible. Alors, que pouvons-nous faire collectivement ?
Commençons par traduire nos engagements en actions effectives pour une gestion durable des océans, notre trésor collectif.
Pour cela, et je ne devrais pas avoir à le redire, écoutons les scientifiques et les chercheurs.
Savez-vous, mesdames et messieurs, que la cause de la défaite de Cléopâtre face à Octave, lors de la bataille d’Actium en 31 avant Jésus-Christ, a été expliquée il y a quelques années, grâce à un groupe de chercheurs, par le phénomène physique des eaux mortes ?
C’est la science qui nous dévoile les mystères du passé, c’est elle qui nous éclaire sur les menaces du présent, c’est elle qui nous propose les solutions pour l’avenir.
C’est pourquoi le soutien à la recherche scientifique et l’écoute de ses préconisations sont plus que jamais des exigences vitales. C’est notre première bataille à tous.
La deuxième, c’est le courage et la volonté de mettre en œuvre. Faire face à des défis globaux, complexes et multidimensionnels, à des fléaux qui n’épargneront personne, exige des efforts participatifs du nord au sud comme de l’est à l’ouest.
Puisse cette conférence mener à davantage de solidarité, à une logique de partage de connaissances et de moyens, et à des mécanismes de financement et d’accompagnement accessibles à tous.
Notre troisième bataille, pour n’en citer que trois, est de nature idéologique. Nous devons corriger notre rapport à la planète bleue, bleue comme l’océan, repenser nos modèles économiques, nos objectifs de croissance, et reprendre la main sur le progrès technologique. L’avenir est sombre sans une vision commune guidée par un humanisme régénéré qui, selon Edgard Morin, exige de cesser d’exalter l’image de l’homme surnaturel, centre du monde, maître de la nature, souverain de l’univers, doté d’un droit illimité sur toute chose.
On sait bien qu’il n’en est rien. L’égoïsme des nations et des individus, le court-termisme, les choix individuels et collectifs de l’opulence pour le moment présent et du mépris de l’avenir nous conduiront collectivement à la ruine.
Il est encore temps de se ressaisir. J’en appelle au courage de l’effort, de l’action collective et à la solidarité avec les générations futures et avec les plus faibles, États comme individus, du temps présent.
Mesdames et messieurs, la mer a façonné l’histoire de mon pays, sa culture, son économie et ses échanges avec le monde. Le destin du Liban et celui de la Méditerranée ne font qu’un. Au nom du peuple libanais, je vous le dis, agissons avant que le point de non-retour écologique ne soit franchi.
Pour conclure, je salue les efforts de la France et du Costa Rica pour l’organisation de cette 3e Conférence des Nations unies sur l’océan, et je vous annonce que j’ai signé pour le Liban le Traité international pour la protection de la haute mer et de la biodiversité marine dans l’intérêt de l’humanité et des générations futures, en vue d’une ratification qui interviendra avant septembre.
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