Invasion en Méditerranée : Les algues brunes à l’assaut des plages marocaines !

 

Les plages dorées de la région portugaise de l’Algarve ont depuis quelques jours été complètement envahies par des tonnes d’algues brunes qui indisposent les estivants. Classée par l’Union Européenne comme « espèce exotique envahissante », cette algue non-indigène (Nom scientifique : Rugulopteryxokamurae) a été signalée en 2015 sur les côtes andalouses espagnoles. Certaines sources décrivent une prolifération qui aurait d’abord débuté dans les plages de Sebta avant de se propager et de gagner les plages de Tarifa, Malaga et Grenade.

Ainsi, selon le média espagnol El Pais, plus de 5.000 tonnes de ces algues brunes ont été ramassées dans la plage de Sebta dès 2015. Du fait de sa ressemblance avec d’autres espèces méditerranéennes, les scientifiques estiment que l’apparition et la prolifération de cette espèce invasive auraient pu se dérouler pendant plusieurs mois sans pour autant être signalées. Pourtant, les impacts négatifs de cette algue sont potentiellement graves.

Faune locale en danger

À ce stade, les biologistes assurent que l’espèce n’est pas toxique pour l’Homme. Ses conséquences sur la faune aquatique locale sont en revanche très inquiétantes. Une étude menée dans la zone marine protégée de Jbel Moussa entre 2015 et 2019 a, par exemple, pu établir que ces algues brunes se sont développées rapidement au détriment de l’habitat coralligène dont la structure a été altérée à cause de la régression d’autres espèces locales.

« Ces espèces sont sensibles à l’augmentation de la température de l’eau et subissaient déjà une régression progressive en raison des perturbations anthropogéniques (dues aux activités humaines, NDLR) et des invasions biologiques précédentes. Tous ces facteurs ont pu réduire la concurrence de niche dans la zone et favoriser les impacts causés par Rugulopteryxokamurae dans la zone », soulignent ainsi les auteurs de l’étude qui pointent par ailleurs « la nécessité d’une réponse administrative rapide pour augmenter les efforts d’atténuation sur cet habitat protégé ».

Impacts sur la pêche

Face à la récente apparition des algues brunes sur leurs côtes, les pêcheurs portugais n’ont pas manqué d’exprimer leur inquiétude. « Les algues peuvent s’infiltrer dans les filets et faire en sorte que ces derniers n’attrapent pas de poissons », a expliqué au micro d’Euronews Fábio Matos, de l’Association des pêcheurs de Barlavento au Portugal.

En raison de sa texture, cette algue brune n’est pas consommée par les poissons et sa prolifération n’est donc pas contrôlée. Ainsi, aux autres espèces invasives qui ont déjà altéré les équilibres de la mer Méditerranée, s’ajoutent également ces algues qui gâchent le plaisir des baigneurs et des promeneurs. Selon les spécialistes, l’algue serait arrivée en Méditerranée en s’accrochant aux coques des navires ou dans les eaux de ballast (utilisées à bord des bateaux pour les stabiliser avant d’être déversées à leur arrivée dans un port). Son apparition au niveau des côtes du Détroit de Gibraltar n’est de ce fait pas anodine au vu du fort trafic maritime que connaît la zone.

Mesures urgentes

« L’état actuel de prolifération de cette espèce exotique envahissante au niveau des côtes et plages méditerranéennes marocaines n’est pas encore établi avec précision. Au vu de son impact négatif sur la faune et la flore aquatiques au niveau des aires protégées marines, mais également sur le tourisme et les activités de pêche, il serait judicieux de mettre en place une cartographie précise pour faire le suivi de la prolifération », estime pour sa part Houcine Nibani, biologiste et président de l’Association de Gestion Intégrée des Ressources (AGIR).

« Au vu également de la croissance du trafic et des introductions accidentelles d’espèces exotiques, il est vital de multiplier les dispositifs de prévention en renforçant notamment les mesures de contrôle du déballastage des navires. Autrement, en tenant compte de la taille et des spécificités de la mer méditerranéenne, il reste difficile de lutter contre l’apparition d’espèces invasives sans mettre en place un effort collectif et coordonné qui implique un maximum de pays riverains », conclut la même source.

Source: L’opinion