L’évolution du climat est scrutée de près par les chercheurs du monde entier. Alors que la Cop29 s’est ouvert ce lundi 11 novembre 2024 en Azerbaïdjan, les scientifiques tirent de nouveau la sonnette d’alarme . Températures, océans, niveaux de CO2… Les indicateurs révèlent une dégradation de la situation et soulignent les efforts largement sous-dimensionnés des pays les plus riches. Voici ce qu’ont révélé les dernières études climatiques.
1. Record de concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère
Malgré nos efforts, les émissions ne cessent d’augmenter. En 2023, les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère ont atteint de nouveaux records, a averti l’Onu lundi 28 octobre. Le CO2 s’accumule plus rapidement que jamais dans l’atmosphère, avec une hausse de plus de 10 % en deux décennies. Et tant que les émissions se poursuivront, les températures augmenteront, se désole l’Agence météorologique mondiale (OMM), chapeautée par l’Onu, qui estime que ces chiffres devraient « sonner l’alarme parmi les décideurs » .
« Ce sont plus que de simples statistiques. Chaque partie par million [l’unité de mesure du CO2 dans l’atmosphère] et chaque fraction de degré d’augmentation de température ont un impact réel sur nos vies et notre planète » , a déclaré Celeste Saulo, la secrétaire générale de l’OMM. D’autant plus que ces gaz à effet de serre restent stockés dans l’atmosphère, aggravant le réchauffement pour les années à venir.
2. Une baisse des émissions très largement insuffisante
Pour 2030, les pays ont fourni leur feuille de route climatique. Problème : dans les derniers documents transmis, les plans d’action climatique nationaux n’ont que peu progressé par rapport à l’an dernier et « sont loin de répondre aux besoins » en termes de lutte contre le réchauffement climatique, a souligné lundi 28 octobre le chef de l’Onu Climat Simon Stiell.
En effet, les engagements climatiques actuels des pays mènent à seulement 2,6 % de baisse des émissions mondiales de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 2019. Au lieu des 43 % préconisés pour espérer limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C, a alerté l’Onu Climat juste avant la Cop.
Ces engagements sont pris par les 195 pays signataires de l’accord de Paris de 2015, qui représentaient 95 % des émissions globales en 2019.
« La pollution par les gaz à effet de serre à ces niveaux garantira un naufrage humain et économique pour tous les pays, sans exception » , prévient Simon Stiell. L’Onu a appelé les pays, par la voix de son secrétaire général Antonio Guterres, à faire un « bond en avant » dans la lutte contre le réchauffement .
3. Conséquences « irréversibles » en cas de réchauffement de plus d’1,5 °C
Il aura fallu trois ans de travaux à 30 scientifiques internationaux pour en arriver à cette conclusion, parue le 9 octobre dans la revue scientifique Nature . Tout réchauffement du climat, même temporaire, au-delà de la limite de 1,5 °C, entraînerait des « conséquences irréversibles » pour l’avenir de l’humanité . Des conséquences qui s’étaleraient sur des millénaires.
Dans une telle trajectoire, des « points de bascule » seraient atteints. Par exemple : le dégel du pergélisol et des tourbières, deux immenses réservoirs de carbone, qui libéreraient d’énormes volumes de gaz à effet de serre s’ils disparaissaient. Le niveau des mers pourrait aussi s’élever de 40 centimètres supplémentaires, ce qui deviendrait une question de vie ou de mort pour les nations insulaires.
Ruisseau et végétation de tourbières près du village de pêcheurs Inuit de Tiniteqilaaq au Groenland. | PHILIPPE ROY / AURIMAGES VIA AFP
Les émissions de gaz à effet de serre de l’humanité s’approchent d’un pic, mais le déclin n’a pas encore commencé alors qu’elles doivent être réduites de près de moitié d’ici à 2030 pour espérer tenir la limite de 1,5 °C. Vu le retard pris, certains scientifiques et décideurs politiques jugent désormais inévitable de franchir ce seuil de 1,5 °C. Selon l’institut européen Copernicus, le mois d’octobre 2024 a été le deuxième mois d’octobre le plus chaud jamais enregistré. Il est désormais « pratiquement certain » que la température de l’année 2024 sera supérieure de plus de 1,5 °C à la période 1850-1900. Ce serait une première.
4. Les océans se réchauffent de plus en plus vite
Selon un rapport de l’observatoire européen Copernicus paru fin septembre , le réchauffement des océans s’accélère dans le monde. Concrètement : les eaux se réchauffent de 1,05 watt par m2 depuis 2005, contre 0,58 watt par m2 dans les décennies précédentes.
« Le réchauffement de l’océan peut être considéré comme notre sentinelle du réchauffement climatique » , a souligné l’océanographe Karina Von Schuckmann, en présentant le 8e rapport sur l’état des océans de Copernicus. Des résultats qui corroborent les rapports du Giec, le groupe d’experts intergouvernemental sur le climat.
Ce réchauffement est la conséquence de « l’excès de chaleur » provoqué par les émissions massives de gaz à effet de serre émis par les humains. Cette chaleur est absorbée à 90 % par les océans depuis les années 1970. Leur préservation est un enjeu majeur de régulation du climat : des eaux plus chaudes entraînent des ouragans et des tempêtes plus violentes, avec leur cortège de destructions et d’inondations.
Le glacier Perito Moreno, près d’El Calafate, en Argentine, en 2018. | WALTER DIAZ / AFP
5. Un courant majeur de l’Atlantique menace de s’effondrer
Autre danger imminent, alertent une quarantaine de chercheurs dans une lettre ouverte aux dirigeants du Conseil nordique, lundi 28 octobre : l’effondrement plus rapide qu’anticipé d’un système complexe de courants océaniques dans l’Atlantique, appelé AMOC (circulation méridienne de retournement Atlantique).
Ce système de courants, qui comprend le Gulf Stream, permet de réguler la chaleur entre tropiques et hémisphère nord et est donc déterminant pour les conditions de vie dans l’Arctique. Mais l’effondrement de ce système constituerait un basculement, entraînant un enchaînement de catastrophes.
À quelle échéance pourrait-il s’effondrer ? Pas avant 2100 selon des experts du climat mandatés par l’Onu. « Dès les prochaines décennies » , alertent ces scientifiques. « Les impacts, en particulier sur les pays nordiques, seraient probablement catastrophiques, incluant un refroidissement majeur de la région tandis que les régions environnantes se réchauffent » , notent-ils. Et dont les effets se feraient aussi « probablement » sentir à l’échelle mondiale.
6. Les inondations meurtrières en Afrique sont aggravées par le réchauffement
Cameroun, Tchad, Niger, Nigeria et Soudan… En 2024, des inondations hors du commun ont fait au moins des centaines de morts et des millions de déplacés sur le continent africain. Des scientifiques du réseau World Weather Attribution (WWA) ont montré, dans une étude parue fin octobre, que le réchauffement climatique a bien participé à aggraver le phénomène.
Vu aérienne des inondations à Adaha, au Nigeria, le 22 octobre 2024. | OLYMPIA DE MAISMONT / AFP
Les chercheurs estiment également que le changement climatique aurait rendu les pluies torrentielles de cette année environ cinq à 20 % plus intenses dans les bassins du Niger et du lac Tchad, citant une précédente étude de la WWA sur des inondations similaires en 2022.
« Cela ne va faire qu’empirer si nous continuons à brûler des énergies fossiles » , a mis en garde la chercheuse Clair Barnes, du Centre pour la politique environnementale à l’Imperial College de Londres. Bien qu’elle ne contribue qu’à 4 % des émissions de gaz à effet de serre, l’Afrique est l’un des continents les plus vulnérables au changement climatique.
Source: Ouest France