COP 27 : Emmanuel Macron veut interdire l’exploitation des fonds marins

 

Accueillie avec surprise par les représentants politiques et ONG présents à la COP 27, l’annonce du chef de l’Etat est un revirement par rapport à la position initiale de la France sur le sujet de l’extraction minière dans les océans. Reste toutefois un long chemin diplomatique pour qu’elle se transforme en règle internationale.

« Je veux être ici très clair, fidèle à ce que j’ai déjà dit : la France soutient l’interdiction de toute exploitation des grands fonds marins. J’assume cette position et la porterai dans les enceintes internationales. » Passé l’effet de surprise, l’annonce d’ Emmanuel Macron , lundi à la tribune de la COP 27, a réjoui de nombreuses ONG environnementales, dont la française Bloom, particulièrement engagée sur le sujet.

Sa fondatrice Claire Nouvian, lauréate du prix Goldman de l’environnement en 2018, s’est d’ailleurs empressée de s’exprimer sur le réseau social Linkedin : « Nous avons donc gagné. Définitivement. C’est énorme. Voilà la force de la mobilisation citoyenne. » La branche française de Greenpeace a également salué cette annonce.

Moratoire de précaution

Par cette déclaration, le président de la République fait donc entrer la France dans le club des pays souhaitant un moratoire de précaution sur l’exploitation des fonds océaniques. Parmi eux, on trouve l’Allemagne, l’Espagne, la Nouvelle-Zélande, le Panama, le Costa Rica, le Chili et divers Etats insulaires du Pacifique.

Une position politique forte et en opposition directe avec les ambitions de certaines compagnies minières pour des ressources comme les terres rares, le cobalt, les nodules polymétalliques, le cobalt, dont les fonds marins regorgent. Et très utiles pour l’industrie électronique, notamment les batteries électriques.

Revirement

Mais attention : si la position française sur le sujet est redéfinie par Emmanuel Macron, celle-ci devra être défendue auprès des différents espaces multilatéraux où normes et règles internationales sont établies. Tout particulièrement l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM), qui tient en ce moment même une session de négociation à Kingston en Jamaïque.

Jusqu’ici pas tout à fait claire d’après les ONG, la position de la France à la COP 27 était très attendue. En tant que deuxième domaine maritime mondial (plus de 10,2 millions de km2), après les Etats-Unis, l’Hexagone pèse d’un vrai poids politique sur cet enjeu.

« La France, en tant que deuxième puissance maritime au monde, va plus loin qu’un moratoire ou qu’une pause de précaution […] La France ne cédera pas aux pays qui veulent adopter un Code minier le plus vite possible, quand bien même avec certaines garanties environnementales », a déclaré le secrétaire d’Etat à la mer, présent dans ces négociations en Jamaïque. Si fin 2021, l’Elysée avait annoncé un plan de 2 milliards d’euros consacré à l’exploration des fonds sous-marins, notamment pour l’accès aux métaux rares, Hervé Berville assure que la donne a changé : « Maintenant, notre stratégie est basée uniquement sur l’exploration scientifique, avec l’Ifremer et le CNRS, pour mieux connaître nos océans et mieux les protéger. »

Prochaines échéances

Lors de la Conférence des Nations unies sur les océans en juin dernier à Lisbonne, le chef de l’Etat avait déjà plaidé pour la création d’un « cadre légal pour mettre un coup d’arrêt à l’exploitation minière des fonds en haute mer et ne pas autoriser de nouvelles activités qui mettraient en danger les écosystèmes océaniques ».

Fin octobre, des députés français de tous bords et différentes associations ont également demandé un moratoire de dix ans au moins sur l’exploitation minière des fonds marins. Le député écologiste Nicolas Thierry a déposé, lundi à l’Assemblée nationale, une résolution en ce sens cosignée par 168 députés.

La COP 15 sur la biodiversité de décembre au Canada, la suite des négociations sur un futur « Traité pour la haute mer » et la prochaine conférence de l’ONU sur l’océan en 2025 sont les prochains rendez-vous, décisifs, pour matérialiser cette volonté politique de la France sur la protection des fonds marins.

Source: Les Echos