Afrique du Sud : au cœur du « sardine run », le spectaculaire festin de l’océan Indien

Surnommé « sardine run », le phénomène est l’un des plus impressionnants à observer dans le monde. Chaque année, durant l’hiver dans l’hémisphère sud, des millions de sardines migrent des eaux chaudes de la côte méridionale de l’Afrique du Sud vers les eaux subtropicales de la côte orientale, distantes de plus de 1000 km, pour retourner pondre leurs œufs là où elles sont nées. Les poissons voyagent en bancs qui peuvent parfois atteindre 30 km de long. Observée pour la première fois en 1853, la migration est déclenchée par la remontée des eaux froides de la côte sud-est du pays et attire un nombre impressionnant de grands prédateurs. 

Un spectacle unique qu’il est possible d’observer, en juin et en juillet, moyennant quelques connaissances en plongée. « Sept à Huit » a accompagné des chanceux qui ont pu observer de près des requins, des baleines et des dauphins venus profiter de l’immense banquet.

 

3000 euros les neuf jours

 

Fatine, quatorze ans, s’apprête à plonger pour la première fois avec des requins. Avec ses parents, elle fait partie d’un groupe de dix Français venus en Afrique du Sud pour plonger à la rencontre des grands prédateurs attirés par le « sardine run ». Et pour la première sortie, le spectacle est au rendez-vous : ils observent des requins cuivre, des squales de près de 2,50 mètres inoffensifs pour l’Homme qui tirent leur nom des reflets sur leurs flancs et des requins bordés, reconnaissables au liseré noir sur toute leur nageoire, accompagnés de rémoras, des poissons-pilotes qui nettoient les squales de leurs parasites et se nourrissent des miettes qui tombent de la gueule de l’animal. 

Comme ces Français, des centaines de plongeurs venus du monde entier se retrouvent chaque année dans la commune de Port St Johns, un bourg de 6000 habitants, pour aller observer la plus importante concentration de grands prédateurs au monde. Un spectacle qui a un coût : 3000 euros par personne pour neufs jours de plongée, vol depuis la France compris, auxquels il faut rajouter 80 euros d’assurance. Malgré le prix, les 200 places disponibles chaque année pour aller voir le « sardine run » sont réservées des mois à l’avance. Des plongées en haute mer qui restent sûres, en 20 ans à Port St Johns, il n’y a eu qu’une seule morsure par un grand requin blanc, en 2015. La victime, sud-africaine, a survécu à cette attaque.

 

La plage la plus dangereuse au monde

 

C’est près du rivage que les risques sont les plus grands. Si Port St Johns attire chaque année des centaines de curieux, elle traîne aussi une triste réputation. Car elle abrite l’une des plages les plus dangereuses au monde : « Second Beach ». « On ne peut pas se baigner ici (…) les conditions de sécurité ne sont pas bonnes, un requin peut arriver et vous attaquer« , explique dans le reportage en tête de cet article Java, l’un des sauveteurs en charge de la surveillance de l’étendue de sable. Il sait de quoi il parle : en 2009, il a vu son frère jumeau se faire dévorer par un requin sur cette plage. 

Son collègue, également présent ce jour-là, raconte. « Le requin est arrivé par en dessous. Il lui a un peu éraflé la jambe pour voir ce que c’était, juste une petite coupure (…) puis il est revenu par derrière, la gueule grande ouverte, et lui a mordu tout le dos ». Âgé de 25 ans, le frère de Java n’a pas survécu à l’attaque. Entre 2007 et 2013, huit accidents mortels ont eu lieu à Second Beach où seuls les pêcheurs viennent désormais pour le « sardine run » pour faire marcher quelques restaurants locaux.

 
 

Un rendez-vous menacé

 

Mais ce rendez-vous unique au monde pourrait bientôt être menacé. Car les requins sont aujourd’hui en danger. Si l’on recense en moyenne cinq attaques de squales mortelles par an, les hommes, eux, en massacrent 100 millions chaque année pour leur chair et leurs ailerons. Aujourd’hui, un tiers des populations de requins sont menacées d’extinction.

Le changement climatique dû aux activités humaines et la surpêche mettent également en danger le « sardine run », le petit poisson étant en situation de surpêche dans de nombreuses régions. Le réchauffement des températures des océans pourrait aussi perturber cette migration unique : pour que les sardines remontent à la surface de l’océan Indien, il faut que la température de l’eau descende en dessous de 20 degrés. Des conditions pas toujours réunies et qui pourraient se faire de plus en plus rares dans les années à venir.

Source: TF1