À quoi ressemblait la Terre la dernière fois que les niveaux de CO2 étaient aussi élevés ?

 

La Terre enregistre des niveaux de CO2 record, à plus de 420 ppm. Notre planète a déjà connu de tels niveaux, et la situation était très, très difficile à cette époque.

La dernière fois que les niveaux de CO2 sur Terre étaient aussi élevés qu’aujourd’hui, les eaux des océans envahissaient des terres sur lesquelles se trouvent aujourd’hui les plus grandes de nos métropoles. Nous étions à une époque répondant au nom de Pliocène, il y a environ 3 millions d’années, avec un niveau de la mer probablement 9 mètres plus haut qu’aujourd’hui et des chameaux géants qui évoluaient dans la grande forêt du Haut-Arctique. Oui, c’était un monde bien plus chaud, environ 3°C plus chaud que les températures pré-industrielles de la fin des années 1800. Le dioxyde de carbone était présent à hauteur d’environ 400 parties par millions (ppm). Aujourd’hui ces niveaux sont similaires (424 ppm) et progressent dangereusement.

 

La Terre a déjà connu de tels niveaux de CO2 dans son existence

 

La Terre est en bonne voie pour atteindre les températures du Pliocène à la fin du siècle. Le niveau de la mer, lui, n’augmentera pas instantanément, évidemment, mais l’Humanité doit se préparer à retrouver un climat similaire. Et ce, très rapidement. Les niveaux de CO2 augmentent à une vitesse folle. “Le CO2 dans l’atmosphère a gagné 100 ppm depuis que je suis née”, déclarait Kathleen Benison, géologue à la West Virginia University. “C’est extrêmement rapide d’un point de vue géologique.”

Ce réchauffement se constate à tous les niveaux – les feux sauvages se multiplient, la banquise se morcèle, les vagues de chaleur se répètent, atteignant des records, etc. Et la progression de ce réchauffement va en exacerber les conséquences. Mais ira-t-on jusqu’à atteindre la situation du Pliocène ? Cela dépend du plus imprévisible des facteurs : l’Homme. “Nous pourrions atteindre le Pliocène en termes de température. Mais cela dépend de la rapidité à laquelle nous émettons [des gaz à effet de serre]”, expliquait Dan Lunt, spécialiste du climat à Université de Bristol.

Certains changements induits par l’Homme et que l’on subit aujourd’hui ne pourraient être inversés en plusieurs siècles ou millénaires, mais la situation progresse trop rapidement, désormais à l’échelle humaine. Le Pliocène ne donne pas toutes les réponses pour savoir ce vers quoi nous allons, mais il nous montre comment certaines zones très sensibles de la Terre réagissent à un réchauffement de quelques degrés. Par exemple, la majorité du Groenland avait fondu pendant le Pliocène et l’on a retrouvé des preuves de plage à plus de 9 mètres du niveau de la mer actuel. “Cela signifie que les calottes glaciaires sont vraiment sensibles à un faible réchauffement”, expliquait Rob DeConto, professeur de climatologie à l’Université du Massachusetts Amherst. Et c’est une mauvaise nouvelle pour notre civilisation qui s’est principalement établie sur les côtes.

 

Nous étions alors au Pliocène et il faisait chaud, très chaud

 

Les niveaux de CO2 ont toujours connu des vagues, les humains n’existaient pas à cette époque, mais certains de nos ancêtres primates évoluaient dans ce qui est aujourd’hui l’Afrique. Mais alors, comment peut-on expliquer de tels niveaux de CO2 sans toutes ces émissions artificielles ? Bien longtemps avant le Pliocène, les niveaux de CO2 étaient extrêmement élevés pendant l’ère des dinosaures, probablement entre 2 000 et 4 000 ppm. En plusieurs millions d’années, ces niveaux sont redescendus jusqu’à environ 400 ppm pendant le Pliocène. Après le Pliocène, la Terre a continué d’en expulser, redescendant à 200-280 ppm pendant l’ère glaciaire, lorsque les mammouths, mastodontes et autres géants dominaient une terre bien plus froide et que les humains ont pu apparaître. Mais l’humanité a cru rapidement et les niveaux de CO2 sont revenus à ceux du Pliocène.

“En 150 ans, nous avons complètement inversé tout ce que le “thermostat de la pierre” a fait ces 3 derniers millions d’années”, expliquait Julie Brigham-Grette, géologue à l’Université du Massachusetts Amherst. “La transition d’un Arctique chaud à un Arctique froid avec ses calottes glaciaires a pris un million d’années. Nous allons faire cela en moins de 150 ans.” En effet, l’Arctique a énormément changé ces 40 dernières années, avec une fonte des glaciers impressionnante. L’Humanité, heureusement, a encore la possibilité de stabiliser les températures de la Terre ce siècle à des niveaux qui permettraient d’éviter des conséquences catastrophiques, mais pour l’heure, nous reproduisons la même trajectoire qu’il y a 3 millions d’années. “Nous allons tout droit vers le Pliocène.”

Source: 24 matins