Bilan du transport maritime de conteneurs en 2024
19 décembre 2024
19 décembre 2024
2024 a été marquée par les perturbations en mer Rouge, qui auront sauvé les résultats financiers des compagnies maritimes, et plombé les efforts environnementaux. Retour sur cette année 2024 en 10 points clés.
L’année 2024 s’annonçait mal pour les compagnies maritimes. Dans leurs premiers cadrages budgétaires, elles prévoyaient des résultats financiers en forte baisse, alors que le marché des taux de fret Asie-Europe s’enfonçait sous les 4 chiffres en octobre 2023. Mais un événement géopolitique est venu changer radicalement la donne. Après les attaques menées par le Hamas le 7 octobre 2023, Israël a engagé une riposte virulente. Quelques semaines plus tard, le 17 novembre 2023, des rebelles houthis du Yémen ont procédé à la capture spectaculaire du navire roulier Galaxy Leader, affirmant agir « en solidarité » avec le Hamas. Un événement qui a marqué le début d’une inversion de tendance spectaculaire.
Les attaques des rebelles houthis contre des navires de commerce se sont multipliées en mer Rouge, ce qui a conduit les compagnies maritimes, en particulier dans le secteur de la ligne maritime conteneurisée, à dérouter massivement leurs navires par le cap de Bonne-Espérance. Cette situation n’était évidemment ni anticipée ni souhaitée par les compagnies. Mais elle a bien eu un effet salvateur sur la restauration de leurs finances, après une année 2023 globalement morose. Force est de constater que trois ans après le Covid, un événement dramatique a, une nouvelle fois, créé une tension de marché exogène qui a profité aux transporteurs. Les résultats de ONE, dont l’exercice fiscal court du 1er avril au 31 mars, en ont fourni une démonstration éclatante. Alors qu’elle était partie pour un exercice 2023-2024 dans le rouge, la compagnie japonaise a finalement dégagé des bénéfices grâce aux résultats du premier trimestre 2024, en raison de la forte remontée des taux de fret durant cette période.
Source : Upply Freight Index
Il convient toutefois de rappeler que dans le même temps, les coûts d’exploitation des compagnies maritimes se sont envolés.
Le passage quasi systémique et contraint des porte-conteneurs par la route du cap de Bonne-Espérance, dont on redécouvre au passage la brutalité de navigation hivernale, a été un coup de pouce du destin inespéré pour les compagnies, car il est intervenu au meilleur moment pour amortir l’arrivée des nouvelles capacités commandées dans l’euphorie post covid.
En gros, l’année 2024 s’est soldée par une hausse de la demande aux alentours de +7%, pour des capacités en augmentation de 3% en tenant compte de l’allongement de la route. Dans le même temps, 2024 a été marquée par un des taux de mise au rebut de navires parmi les plus faibles de l’histoire récente.
Le Transpacifique a su rester un marché équilibré, actif et rémunérateur tout au long de 2024, avec un effet d’aubaine pour les compagnies en fin d’année. Alors que les taux avaient tendance à s’effriter au dernier trimestre sur ce trade, après les records battus par les ports de la côte ouest-américaine, l’annonce de l’instauration de droits de douane additionnels par la future administration Trump a suscité un sursaut de commandes anticipées. Cela a permis de continuer à contenir l’érosion des taux de fret pour la fin d’année.
Sur l’Asie-Europe, l’histoire est différente. Les porte-conteneurs géants se révèlent définitivement difficiles à remplir. Les compagnies ont dû composer tout au long de l’année avec une demande européenne devenue assez atone. On n’a pas vu de réel sursaut lié à la Golden Week ni d’emballement sur les commandes de réassort, car les niveaux de stock étaient globalement confortables. La faiblesse de la demande se reflète d’ailleurs dans les résultats des acteurs du retail européen, qui sont plusieurs à connaître de sérieuses difficultés financières.
Le rallongement des routes a permis d’instaurer une tension suffisante sur le marché pour maintenir des taux de fret assez élevés durant une bonne partie de l’année. Un certain effritement a été constaté depuis le mois de septembre, alors que le passage par la route du cap de Bonne-Espérance devient une nouvelle norme désormais intégrée dans les schémas logistiques et que la demande reste faible. Un rebond que nous estimons ponctuel est intervenu au fin d’année.
2024 devait être une année de promesses tenues en matière de contrôle des émissions, avec des premiers progrès mesurables grâce à l’emploi plus massif de carburants plus vertueux et à l’inclusion du transport maritime le Système d’échange de quotas d’émissions de l’Union européenne (SEQE-UE), plus connu sous l’acronyme anglais ETS (Emissions Trading System), à compter du 1er janvier 2024. Mais patatras, en lieu et place d’une amélioration, le bilan carbone moyen d’un conteneur de 40’ sur l’axe Asie-Europe s’est dégradé de 20 à 40% en moyenne par rapport à 2023, en raison de l’allongement des routes. C’est évidemment un non-sens absolu, alors que la question climatique sort du champs politique pour devenir sociétale, chaque individu en percevant désormais les effets, mais aussi économique, avec des sinistres climatiques dont les dégâts se chiffrent en milliards (…).