COP28 : pendant que l’on parle à Dubaï, la glace des pôles craque en accéléré
6 décembre 2023
6 décembre 2023
Et si les pôles étaient plus vulnérables qu’on ne l’a cru ? Et si des kilomètres cubes de glace, qu’on pensait fermement arrimés sur le socle rocheux du Groenland et sur le profil tourmenté de l’immensité antarctique, se mettaient à glisser sans retenue vers la mer ? Cette perspective a de quoi noircir les scénarios de quelques films catastrophe à la sauce hollywoodienne. Sauf qu’en l’espèce, on ne voit pas bien comment une telle histoire pourrait accoucher d’un « happy end ». À quelques chouïas près, la disparition des quelque 30 millions de km³ de glace d’eau douce qui congèlent l’Antarctique ferait bondir le niveau marin de 70 mètres. Celle des glaces du Groenland, de sept mètres.
Sur le très long terme, l’hypothèse n’a rien de farfelu. Après le dernier maximum glaciaire, il y a 20 000 ans, l’océan mondial a grimpé de 120 mètres, jusqu’au niveau que nous connaissons aujourd’hui. La reprise de la hausse dans de telles proportions n’est pas (encore) au programme. Les eaux ont monté d’une vingtaine de centimètres depuis le début du XXe siècle, principalement à cause de leur expansion thermique – l’eau plus chaude a un volume supérieur. Mais l’amaigrissement des deux calottes glaciaires, nord et sud, a bel et bien commencé et dope l’escalade.
Publié en 2019, le rapport spécial du Giec (le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) consacré aux océans et à la cryosphère donne à voir l’ampleur du problème. Sur l’intervalle 2012-2016, la perte de masse des glaces du Groenland tutoie les 250 milliards de tonnes par an, une explosion par rapport à la période 1992-2001. Les dégâts sont moindres en Antarctique, plus stable : – 200 milliards de tonnes par an entre 2012 et 2016, mais à un rythme quadruplé par rapport à 1992-2001.
Si le réchauffement des températures de l’air joue un rôle prépondérant sur la fonte, c’est celui de l’océan Arctique (augmenté de la mer du Groenland et de la mer de Baffin) qui change la donne au Groenland. Quand ils atteignent le littoral, les glaciers des calottes polaires se prolongent par des appendices de glace qui reposent d’abord sur le fond marin avant de se mettre à flotter à mesure qu’on s’éloigne au large. On les nomme barrières ou plateformes de glace. « Dans le nord du Groenland, elles atteignent 600 à 800 mètres d’épaisseur ».