Une nouvelle étude appelle à protéger d’urgence « l’oasis de l’Arctique »
4 août 2023
4 août 2023
L’écosystème de l’arctique, en particulier la polynie des eaux du nord, reste relativement stable face aux impacts du changement climatique. Cette zone, riche en biodiversité, attire de nombreuses espèces de poissons, d’oiseaux, de mammifères marins et d’ours polaires. Cependant, l’amincissement de la glace provoque l’effondrement des arches de glace plus tôt chaque année, menaçant ainsi la stabilité de l’écosystème à long terme. Bien que la productivité biologique soit pour l’instant maintenue, les chercheurs avertissent que le réchauffement climatique pourrait mettre en péril cette oasis arctique et sa contribution à la sécurité alimentaire des populations autochtones locales.
Les chercheurs ont étudié une région de l’Arctique connue sous le nom de « polynie des eaux du Nord », une zone qui reste libre de glace ou couverte d’une couche de glace très mince, au milieu de la banquise. Située au nord de la baie de Baffin, entre le Canada et le Groenland, cette zone crée un microclimat relativement plus chaud grâce à l’eau douce fondue, ce qui déclenche chaque printemps une abondante floraison de phytoplancton.
L’étude indique que le site attire diverses espèces de poissons, d’oiseaux, de morses, de narvals, de baleines, de phoques et d’ours polaires qui viennent s’y nourrir, s’y accoupler et s’y reposer. « Depuis plusieurs millénaires, la polynie est également une source d’alimentation traditionnelle pour les populations autochtones locales », note le document.
On apprend aussi dans l’étude publiée récemment dans la revue Scientific Reports que les experts désignent la polynie des eaux du Nord sous l’acronyme « NOW », tandis que les Inuit du Canada l’appellent Sarvarjuac et les Inuits du Groenland, Pikialasorsuaq.
« L’Arctique est en grande partie comme un désert », déclare Kent Moore, directeur de l’étude.
Il ajoute qu’il est difficile pour une grande partie de la faune de survivre dans cet endroit. « Mais les eaux du Nord sont tout à fait étonnantes, car il s’agit de l’écosystème le plus biologiquement productif de la région. On peut le considérer comme une oasis dans l’Arctique. »
La polynie des eaux du Nord se situe sous le détroit de Nares, une voie navigable de 40 kilomètres sur 600 kilomètres qui séparent le nord-ouest du Groenland de l’île d’Ellesmere, entourée de la glace de mer la plus ancienne et la plus épaisse du monde.
« Chaque hiver, des arches de glace d’une longueur pouvant atteindre 100 kilomètres se forment aux extrémités nord et sud du détroit, raconte M. Moore. Elles stabilisent la glace pendant sept ou huit mois, empêchant les glaces flottantes qui se brisent de descendre dans la mer du Nord. »
Pour comprendre comment le réchauffement de la planète touche la région, les chercheurs se sont associés à deux scientifiques d’Environnement et Changement climatique Canada pour étudier les arches de glace. Ensemble, ils ont révélé que l’amincissement de la glace provoque l’effondrement de ces arches de plus en plus tôt chaque année.
« Ce changement se traduirait par une réduction de la productivité, une diminution du nombre d’espèces dans la région et un déclin général de la richesse de l’écosystème », précise l’étude.
Cependant, malgré les variations de l’activité des arches de glace, la productivité biologique dans la polynie des eaux du Nord est restée stable, assure le document. Selon M. Moore, cela pourrait s’expliquer par le fait que les vents forts de la région poussent la glace dans la polynie, puis hors de celle-ci, ne leur laissant pas le temps de perturber l’écosystème.
« C’est une bonne nouvelle que la polynie soit plus stable qu’on ne le pensait. Nous pouvons respirer un peu mieux pour les prochaines années », dit-il.
Mais à mesure que le changement climatique s’intensifie, la polynie pourrait être menacée, notent les experts. En tant qu’habitat essentiel pour un grand nombre d’espèces et en tant que facteur clé de la sécurité alimentaire des communautés autochtones locales, il convient d’avoir un œil sur cette région, soulignent-ils.
« Le problème sous-jacent est que nous continuons à réchauffer la planète », conclut M. Moore.