En Bretagne, l’économie bleue est la couleur de l’avenir
30 juin 2023
30 juin 2023
5 500 km de côtes, des écosystèmes remarquables, une production halieutique maîtrisée, le monde de la mer semble avoir tous les atouts pour relever les défis de demain. Après avoir fait face au Brexit, à la hausse des prix du carburant mais surtout à la baisse des ressources, le secteur de la pêche reste, grâce aux filets de sécurité mis en place par les pouvoirs publics, l’un des secteurs clés de l’économie bleue. Elle emploie, directement ou indirectement, près de 120 000 personnes et mise plus que jamais sur l’innovation et le développement de start-up « made in Breizh ». De l’énergie osmotique à la production de bioplastiques, en passant par la construction navale et les biotechnologies marines, l’économie bleue a su saisir les opportunités de développement liées à la transformation environnementale de notre époque.
Côté pêche, alors qu’un plan de sortie de flotte, suite au Brexit, a conduit à la casse de quarante-cinq bateaux (soit 4% de la flotte bretonne), la région a mis en place un plan d’aide à l’installation pour permettre aux jeunes d’acquérir une seconde -bateau à main destiné à un port breton. Une aide soutenue par le Fonds européen maritime, pêche et aquaculture (Feampa), qui n’a pas rencontré le succès escompté, puisque seuls 13 jeunes patrons pêcheurs ont obtenu cette aide d’un montant maximum de 75 000 euros pour un premier bateau de moins de 12 mètres et 100 000 euros au-delà de 12 mètres.
Un résultat qui met en lumière les contraintes budgétaires liées à la profession. Pour répondre à ces enjeux, la filière met en place des mécanismes de préservation de la ressource, mais aussi de renouvellement de la flotte. L’objectif, maintenir un secteur de la pêche dynamique en attendant de lancer le bateau du futur, moins consommateur de carburant. Il pourrait s’agir d’un bateau à hydrogène, fruit d’une stratégie d’ingénierie impliquant motoriste, chantiers navals et pouvoirs publics.
Une nécessité, quand on sait qu’en France, 5 000 marins devraient partir à la retraite d’ici 2030.
Un autre pilier de l’économie bleue est l’aquaculture : la production et la transformation d’organismes aquatiques, qu’il s’agisse d’animaux, de poissons, de crustacés, de mollusques ou de végétaux comme les algues. Ce secteur subit les effets directs du réchauffement climatique et des transformations qui en découlent. Pour les professionnels du secteur, la régénération de la biodiversité et la préservation de la ressource deviennent incontournables. Pour le spécialiste des produits de la mer Mytilimer, cette adaptation aux changements de paradigme passe par une meilleure valorisation des produits.
Citons par exemple la création du site de production de Kerbone, près de Cancale. Désormais, les moules sous-taille ou surtaille (environ 25% de la production) sont valorisées dans l’industrie agro-alimentaire ou la nutrition animale.
Un nouveau modèle qui a nécessité à l’entreprise brésilienne (35), un investissement de près de 20 millions d’euros. Selon Maïwenn Abgrall, chargée de mission maritime au Crédit Mutuel Arkéa, qui a soutenu ce projet industriel : « C’est par l’innovation que le secteur maritime réussira ses transitions »
La ressource reste le principal frein au développement du secteur aquacole. Les algues et leurs dérivés, dont certains pourraient être utilisés dans les traitements médicamenteux de demain, en sont le parfait exemple.
Alors que la France importe près de 80 % des algues transformées sur son territoire, selon Daniel Cueff, vice-président Mer et Littoral de la région Bretagne : « On ne peut pas augmenter la pression sur la récolte des algues sans augmenter les surfaces de production ou fragiliser la ressource » . Avec le cluster Algue, créé en avril dernier, entreprises, territoires et établissements de recherche s’emploient à multiplier les zones de production. Avec les algues endogènes, de nouvelles zones de production pourraient voir le jour, dont 400 hectares près de Quiberon, selon l’élu breton.
Qu’il s’agisse de pêche ou d’aquaculture, il est essentiel de protéger la santé à long terme de ces écosystèmes fragiles. La transformation des filières pêche et aquaculture passe par une consommation responsable, comme le permet Poiscaille, qui assure une production issue d’une pêche responsable, et garantit des produits ultra-frais ainsi qu’un revenu décent au pêcheur. L’économie bleue reste l’un des secteurs économiques à fort potentiel de croissance qui entraîne dans son sillage un grand nombre de startups.
SeaBird en est un. Afin de réduire les émissions de carbone et les produits dérivés du pétrole, SeaBird a développé des filets de pêche biodégradables, fruit de huit années de recherche. Fini les filets trémails fins en plastiques conventionnels, bienvenue au plastique biosourcé, biodégradable et compostable. Un succès Made in Golfe du Morbihan, à l’heure où l’on discute d’un traité international juridiquement contraignant sur le plastique. Chaque minute, 20 tonnes de plastique sont déversées dans les océans du monde, selon les estimations de Plastic Odyssey.
Autre innovation de rupture, qui nous vient de Rennes, et qui prend sa Source dans le bleu de l’océan : l’énergie osmotique. Grâce à sa technologie INOD, la startup Sweetch Energy permet la production d’électricité propre à partir d’eau salée. Une énergie durable et propre qui émerge naturellement de la rencontre entre l’eau douce et l’eau salée, dans tous les deltas et estuaires de la planète. Pionnière de l’énergie osmotique et nouvelle filière française de l’électricité renouvelable, la startup bretonne vient de remporter le prix « Tech For Future 2023 », organisé par La Tribune, dans la catégorie Environnement et Énergie.
Alors que François Gabart, ancien skipper du géant des mers “Macif”, porte un projet de cargo entre la France et New York, on ne pouvait clore ce tour d’horizon de l’économie bleue sans mettre à l’honneur le nautisme. L’un de ses champions, Multiplast, constructeur du géant des mers Sodebo de Thomas Coville, fait fructifier ses innovations techniques au-delà de l’économie bleue. L’entreprise vannoise a réalisé le fuselage du tout premier avion de tourisme électrique, “Alice”, conçu par la start-up israélienne Eviation Aircraft, une performance saluée lors du dernier salon du Bourget.
Élément important du patrimoine naturel et culturel de la Bretagne, la mer reste un élément essentiel du développement économique, social et culturel de la Bretagne. Une mer bleu turquoise.