Pollution plastique : à Genève, nouvelle tentative pour un traité à l’échelle du cycle de vie

 

La Conférence des Nations unies sur l’océan qui s’est tenue à Nice en juin dernier, a permis aux pays partisans d’un traité ambitieux de se compter, et de maintenir la pression avant l’ouverture de l’INC 5.2, soit la deuxième partie de la cinquième session du Comité intergouvernemental de négociation sur la pollution plastique. Elle se tiendra à l’Office des Nations unies de Genève, du 5 au 14 août, et est supposée être la dernière. Comme l’était la précédente à Busan, en décembre dernier.

En juin, 95 États sur les quelques 170 impliqués dans la négociation ont ainsi signé « l’appel de Nice pour un traité ambitieux sur les plastiques ». Les signataires considèrent que « l’adoption d’un objectif mondial de réduction de la production et de la consommation de polymères plastiques primaires », la mise en place d’une  « obligation juridiquement contraignante pour éliminer progressivement les produits plastiques les plus problématiques et les substances chimiques préoccupantes » ou encore l’amélioration, par une obligation contraignante, de la conception des produits plastiques », sont des conditions nécessaires pour « parvenir à un accord à la hauteur de ce que la science nous dit et de ce que nos citoyens réclament ». 

Ces objectifs correspondent également au mandat du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) fixé par la résolution 5/14, adoptée en mars 2022, avant que débutent les discussions. Selon cette résolution, les négociations devront permettre d’adopter un instrument international juridiquement contraignant pour mettre fin à la pollution plastique, « y compris dans le milieu marin », et à l’échelle du cycle de vie du plastique, de l’extraction des matières premières nécessaires à sa production, à son élimination.

 

La Chine, pays clé dans les négociations

 

« Le problème, c’est que le PNUE semble désormais vouloir un texte à tout prix, quitte à tirer ces ambitions vers le bas », déplore Henri Bourgeois-Costa, chargé de plaidoyer sur les enjeux liés aux plastiques à la Fondation Tara Océan, qui bénéficie du statut d’observateur à l’ONU et participe à ses travaux. Car de session en session, deux camps irréconciliables s’opposent : celui des « willings », les partisans d’un traité ambitieux à l’échelle du cycle de vie, dont les rangs grossissent, et celui des « like minded », les récalcitrants qui veulent protéger leurs industries pétrolières et pétrochimiques, au premier rang desquels la Russie, l’Inde et les pays du Golfe arabo-persique emmenés par l’Arabie saoudite.

« Leur position pourrait être renforcée par l’attitude unilatérale des États-Unis », indique Henri Bourgeois-Costa, qui rappelle au passage qu’ils signent et ratifient peu de traités internationaux (« et les appliquent encore moins »), et produisent principalement pour leur marché intérieur. L’espoir pourrait paradoxalement venir de la Chine, premier producteur mondial de plastique, qui porte depuis quelques années un projet de « civilisation écologique », et dont le président Xí Jìnpíng a, à plusieurs reprises, souligné la nécessité de réduire la production mondiale de plastique, qui atteint les 460 millions de tonnes chaque année et pourrait tripler d’ici 2060 en cas de statu quo, selon les chiffres du PNUE et de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

« La réduction de la production doit être au centre de tous les efforts et au cœur du traité », abonde Henri Bourgeois-Costa. « Il faut faire le deuil du consensus, que souhaite le PNUE, mais qui porte le risque d’un texte mou et sans contenu. Il faut aller au vote, avec les pays ambitieux, qui doivent passer à l’offensive ». Plusieurs délégations ministérielles sont annoncées à la fin des négociations. « La présence politique est toujours un signal fort », commente le chargé de plaidoyer de la Fondation Tara Océan. La ministre française de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, devrait faire le voyage jusqu’à Genève. 

Source : Mer et Marine