« Les dents de la mare » ou la vie insoupçonnée d’un monstre d’eau douce, le silure.

 

On dit de lui que rien ne lui résiste, ni les plantes, ni les poissons, ni les pigeons, ni même les chiens. Sa légende de monstre d’eau douce lui colle aux nageoires. Il, c’est le silure. Et ce poisson là, n’a pas la côte. Dans son film « Les dents de la mare », Stéphane Granzotto nous emmène à la découverte d’un animal bien plus complexe qu’il n’y parait.

Le premier qualificatif qui vient à l’esprit quand on le voit c’est : « moche ». Il est vrai qu’il ne fait pas complètement envie ce silure. D’autant plus que d’horribles légendes l’accompagnent. On le dit mangeur de chiens, de bétails, d’hommes. On le surnomme « l’ogre d’eau douce », « le monstre ». Mais il fascine ce silure. Les pêcheurs, les chercheurs, les plongeurs et quelques restaurateurs.

C’est avec eux que Stéphane Granzotto, propose de le découvrir. Une sacrée bestiole :  » C’est le plus gros poisson d’eau douce au monde. Il peut mesurer jusqu’à trois mètres et peser plus de 100 kg »  précise Frédéric Santoul, chercheur à l’université de Toulouse.

C’est en 1969, que le géant est vu pour la première fois dans les eaux de la Saône, tout prêt de Lyon. Originaire du Danube, on ne sait pas vraiment comment il est arrivé en Rhône-Alpes. Ce que l’on sait en revanche, c’est qu’il prospère et colonise très rapidement, fleuves, rivières, lacs et bien au-delà des frontières rhônalpines.

 Pour les pêcheurs le silure est :  » Un poisson mythique, un adversaire de taille, un costaud, un sportif avec lequel il faut avoir engagé un duel au moins une fois dans sa vie  C’est une pêche très technique, très physique. Elle s’apparente à la pêche au gros mais sans aller au bout du monde ! » raconte Damien Modrak, guide de pêche. Il parait  même qu’à une époque pas si lointaine, c’était très « tendance » de traquer le silure sur la Saône.

Pour les scientifiques le silure est loin d’avoir livré tous ses secrets. On sait qu’il était là il y a 8 millions d’années. Des fossiles retrouvés en Ardèche le prouvent. On sait qu’il vit 30 à 40 ans. On sait qu’il est adaptable, qu’il résiste à la pollution et qu’il est malin et sociable comme l’a constaté Rémi Masson, biologiste et photographe : « Mes plongées m’ont permis d’observer de véritables rassemblements de silures. Ils se frottent entre eux. On sait qu’ils émettent des sons aussi. Ce sont des animaux sociaux ». Un comportement confirmé par Stéphane Granzotto, le réalisateur du documentaire :

 » Au cours des prises de vues sous-marines, je me posais au sol immobile et les silures venaient me voir. Avec leurs  barbillons, ils faisaient connaissance, s’habituaient peu à peu à ma présence. Le silure est le seul poisson d’eau douce à se comporter ainsi. Jusqu’à présent je n’avais connu ça qu’avec les mammifères marins. »

 

Social et conquérant. Des silures ont élu domicile dans le Lac du Bourget en Savoie . Un milieu protégé, gardé, jusqu’à présent, par le brochet, un autre prédateur. Le brochet désormais menacé par plus fort que lui. La présence du gros poisson chat dans le lac inquiète les chercheurs. Car l’animal n’a pas la notion des espaces protégés. Et avec lui, les nurseries d’espèces aquatiques historiques sont menacées. Tout comme les espèces migratrices dans les rivières. C’est le cas du saumon par exemple.

Géant sympathique ? Prédateur redoutable des eaux douces ? Le silure fait l’objet d’une étude menée actuellement par le muséum national d’histoire naturelle. Les résultats devraient être connus dans plusieurs mois. On en saura alors peut-être un peu plus sur cette étrangeté aquatique mi- fascinante, mi- inquiétante.

Source: Franceinfo