Le blanchissement « intense » du récif corallien de La Réunion, aggravé par le réchauffement et le cyclone Garance
1 août 2025
1 août 2025
En plongée au Cap La Houssaye, Jean-Pierre Quod ne remonte pas avec de bonnes nouvelles. Militant dans l’association Reef Check, qui étudie le récif corallien de La Réunion, il vient d’inspecter l’une des 45 cuvettes ciblées par l’association pour inventorier les espèces et leur évolution.
« Là, le bilan n’est pas très bon car je n’ai trouvé aucun corail vivant, aucune holothurie et aucun oursin diadème », constate-t-il. L’absence de ces animaux, témoins de la bonne santé du récif, n’est pas de très bon augure.
Regardez le reportage de Réunion La 1ère :
« On va faire ça régulièrement sur tous les sites Reef Check de La Réunion pour voir comment le système récifal évolue, par rapport au cyclone Garance et au blanchissement corallien mais aussi par rapport au problème des oursins diadème qui sont morts il y a deux ans », explique cet amoureux des coraux.
Depuis vingt ans qu’il étudie ce milieu, ce passionné a constaté en 2025 des températures marines bien supérieures aux normales, notamment durant l’été austral, et qui ont favorisé le phénomène de blanchissement des coraux. Le mercure a atteint des niveaux moyens jamais vus depuis que les relevés se font par satellite, en 1985.
« En 2024, on était globalement dans une sorte de canicule marine. Et en 2025, le pic de canicule marine a été extrêmement élevé, le plus fort qu’on ait jamais eu à La Réunion » souligne-t-il.
Cette hausse des températures a été aggravée en février par le passage du cyclone Garance et les fortes pluies associées. « Les zones de mortalité les plus critiques qu’on a observées à Saint-Leu, à la Saline ou à Saint-Pierre, c’est à chaque fois qu’on a une ravine, un exutoire ou une rivière qui arrive, et c’est là qu’on va avoir la descente de boue la plus importante et qu’on va avoir, en plus du blanchissement, un stress qui est basé sur la qualité des eaux, le colmatage par la boue », explique Jean-Pierre Quod.
Après de tels phénomènes, il faut compter dix à quinze ans pour que les récifs puissent se restructurer.
Dans les années 70, le taux de recouvrement des coraux dans le lagon et sur les pentes externes était de 60 %. En 2000, il était tombé à 40 %.
« En 2022, on était plutôt à 20-25 % de corail vivant, et on peut penser qu’avec l’impact de 2025, du blanchissement et de Garance, on va probablement tourner autour de 10 %. Ce qui est totalement insuffisant pour continuer à remplir ce qu’on appelle les services écologiques et les services écosystémiques du récif », alerte le militant associatif.
Seule bonne nouvelle selon Reef Check, ces 10 % de coraux restant sont devenus des super-coraux résilients, qu’il faut à la fois préserver et étudier.
En parallèle à cette surveillance associative, l’Etat, avec l’Ifrecor, mène actuellement une étude visant à « évaluer le blanchissement du corail et sa mortalité associée. Il s’agit de l’évaluation la plus importante jamais réalisée à La Réunion. »
Ses premiers résultats indiquent que le blanchissement en 2025 est « intense » sur tous les platiers et pentes externes des récifs :
La mortalité corallienne totale associée au blanchissement doit être évaluée cet hiver, lorsque les températures de l’eau auront baissé.
Selon certaines estimations, la seule présence d’un récif en bonne santé rapporterait à l’économie de l’île 45 millions d’euros par an, en favorisant des activités comme le tourisme, la plongée ou la pêche.