En mer, le plastique favorise la propagation d’une bactérie potentiellement toxique

 

Une étude publiée jeudi démontre qu’une bactérie toxique pour l’homme est particulièrement à l’aise sur les fibres plastiques rejetées dans la mer Méditerranée. Cette bactérie, à terme, se retrouve dans notre assiette.

De la tong perdue sur la plage aux filets de pêcheurs, les océans regorgent de plastique et la Méditerranée est la mer la plus polluée par eux. Chaque année, ce sont plus de 200.000 tonnes de plastiques qui sont déversées dans ses eauxd’après l’Union internationale pour la conservation de la Nature.

Lorsqu’ils se fragmentent en minuscules morceaux, ils deviennent un support idéal pour les différentes bactéries de l’océan. Dans une étude qui parait jeudi dans la publication scientifique PLOS One, une équipe de chercheurs a découvert qu’une bactérie potentiellement dangereuse pour l’homme se développe particulièrement bien sur les micro fibres de plastique en particulier.

La redoutable Vibrio Parahaemolyticus adore le plastique

Les chercheurs du CNRS ont étudié 200 bactéries, dont l’une est bien connue des producteurs d’huitres ou de coquillages : la Vibrio Parahaemolyticus. Elle vit près des côtes et sa présence conduit régulièrement à suspendre la commercialisation des mollusques et coquillages pour éviter les intoxications. Si les chercheurs avaient récemment découvert qu’elle pouvait s’accrocher au plastique, ils montrent désormais qu’elle adore ce matériau.

Sur les fibres textiles récupérées le long de la Côte d’Azur, « on a trouvé jusqu’à 30% de l’abondance des espèces qui se développent naturellement sur les plastiques », explique Jean-François Ghiglione, chercheur au laboratoire d’océanologie de Banyuls-sur-Mer (Pyrénées-Orientales).

Le plastique peut en transporter pendant des décennies

Or, le plastique a une durée de vie très longue, contrairement à d’autres particules naturelles qui accueillent des bactéries, comme le bois ou les sédiments. Ce type de micro-fibres pouvant résister en mer des dizaines, voire des centaines d’années, chaque morceau aura le temps de se disperser dans les océans par les courants. « Elles deviennent des petits radeaux qui vont transporter ces espèces sur des kilomètres et des kilomètres », jusqu’aux moules, huîtres, homards ou écrevisses que l’on mange. Lorsqu’ils les rencontrent, les animaux les avalent, car une fois colonisées par les bactéries, ces micro-fibres plastiques ont une odeur de nourriture.

Lorsqu’ils sont crus ou mal cuits, des aliments peuvent provoquer des intoxications. Cette bactérie Vibrio Parahaemolyticus a déjà provoqué des épidémies en Asie et aux États-Unis.  Elle provoque des gastroentérites ou des infections par les plaies pendant une baignade, mais aussi plus rarement des septicémies.

Le réchauffement des eaux favorise sa propagation

La température de l’eau de mer et le réchauffement climatique en cours ont une influence sur la propagation de cette bactérie, souligne Maria Luiza Pedrotti, chercheuse CNRS à Villefranche-sur-Mer, près de Nice, également autrice de cette étude. À partir de 26°C, la bactérie devient pathogène. Or, « cette année, la température [de la Méditerranée] était déjà à 29,5°C à certains endroits, c’est ça qui est inquiétant », affirme la chercheuse.

Restent plusieurs questions à éclaircir : d’où vient cet agent infectieux ? De la côte ? Des fleuves ? Ou des sédiments marins où il serait dormant ? C’est ce sur quoi les chercheurs vont désormais travailler.

Source: radiofrance