Au large de Cannes, une île artificielle questionne l’avenir des plages

Au large de Cannes, de Mandelieu et de Théoule, un gigantesque trimaran, « une île nomade » devrait mouiller d’ici la fin du mois et proposer à quelques plaisanciers fortunés un restaurant, un bar, une piscine d’eau douce et des transats. Un projet qui n’est pas sans rencontrer des oppositions…

Avec
  • Samuel Robert Géographe, directeur de recherche au CNRS au laboratoire ESPACE à Aix-Marseille Université, directeur de l’Observatoire Hommes-Milieux « Littoral méditerranéen » du CNRS.

C’est un projet qui fait des vagues et provoque des remous. Pensez donc un gigantesque bateau de 1750 m² dans le golfe de la Napoule au large de Cannes où l’on pourrait venir se restaurer, boire un verre, bronzer au bord d’une piscine d’eau douce ou danser le soir. C’est le projet que deux entrepreneurs veulent finaliser ce mois d’avril en expliquant à la presse : « Dans trente ans, avec la montée des eaux, il n’y aura peut-être plus de plage à Cannes. Alors, il y aura des îles artificielles ; celle-ci est la première. » Cet entretien se donne pour objectif de discuter de l’opportunité de tels projets et du développement du littoral azuréen.

 

Canua Island : un projet qui ne fait pas l’unanimité

 

Ce projet fait partie des solutions qui peuvent être proposées sur les littoraux, ces derniers étant saturés. Il n’y a plus de place sur les littoraux et en particulier sur la côte d’Azur. Des alternatives sont donc recherchées, aussi pour répondre aux attentes de certaines personnes, d’un certain public qui attend ce type de prestation.

Sur le plan politique, ce projet engendre des frictions entre le président de la région Renaud Muselier, pour une fois allié au maire de Cannes David Lisnard qui s’opposent tous deux au projet, et le maire de Mandelieu, Sébastien Leroy se dit plutôt intéressé. Il s’agit de postures politiciennes, mais aussi de rivalités entre les stations balnéaires. Les élus locaux sont à la recherche de la meilleure des solutions sachant qu’ils ont tous à gérer un littoral très tourné vers le tourisme qui a une attractivité et une renommée internationale. Il faut donc pouvoir s’adapter aux enjeux de la transition écologiques et en même temps faire perdurer une économie tournée vers le tourisme et le littoral.

 

Quelle décision de l’Etat face aux plages en danger ?

 

Le processus d’érosion est très dommageable pour les plages. En contexte méditerranéen, les plages se trouvent en contexte urbain, et en arrière de la plage, on retrouve rapidement la ville. La plage ne peut pas être mobile comme elle l’est en milieu naturel, elle ne peut pas non plus résister aux assauts de la mer en se déplaçant vers l’intérieur des terres. Sur la côte d’Azur, les territoires sont très urbanisés et ce phénomène de déplacement du stock sédimentaire n’est pas possible. Donc lorsqu’il y a des assauts de la mer, il y a toujours de l’érosion, en raison de la dérive littorale. Les sédiments s’en vont au large, et les plages régressent.

Actuellement, le maire de Cannes en a appelé à Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique et de la cohésion des territoires, et même à la cheffe du gouvernement Élisabeth Borne. Ce type de projet ne peut avoir lieu sans l’aval des services de l’Etat. Les collectivités territoriales n’ont pas autorité en mer au-delà des 300 mètres, ils n’ont pas le même pouvoir d’administration du territoire. La possibilité d’exploiter une telle structure doit donner lieu à une autorisation de l’Etat.

Source: radio france