Transport maritime : L’aubaine des vraquiers pour le Maroc !
12 août 2022
12 août 2022
A l’instar du secteur automobile qui tire pleinement profit de la crise ukrainienne, l’univers maritime marocain peut lui aussi considérablement faire une bonne affaire avec le chamboulement actuel dans le secteur des hydrocarbures et de la demande mondiale en phosphates.
A l’instar de la guerre en Ukraine qui s’est révélée être une véritable opportunité pour l’industrie automobile nationale, la crise actuelle sur les hydrocarbures peut elle aussi se transformer en une très bonne affaire pour le Maroc. Et comment ?
Avec la crise en Europe de l’Est, deux faits majeurs sont constatés dans le transport maritime et sont en train de redistribuer les cartes : le premier porte sur le basculement partiel vers la variante maritime du transport de Gaz Naturel Liquéfié (GNL) en lieu et place des gazoducs, comme le Nordstream par exemple.
Le second consiste en une pression accrue sur l’alternative phosphatée par rapport aux engrais azotés dérivés du méthane. Ce qui entraîne obligatoirement un accroissement de la demande en phosphatiers, soufriers et autres chimiquiers. Par voie de conséquence : « il faut doubler la capacité de ces navires vraquiers pour répondre à la demande mondiale », préconise l’expert maritime, le professeur Najib Cherfaoui. Par vraquier, on entend tout navire qui transporte des marchandises solides (céréales et minerais) ou liquides (pétrole, gaz et produits chimiques). Dans le monde, il y a actuellement 26.000 bateaux de ce genre, à parts égales solides/liquides.
Maîtriser la logistique
Autrement dit, le Maroc dispose d’une des ressources les plus demandées actuellement dans l’agriculture mondiale : le phosphate. Aussi, sa position géographique stratégique place le Royaume au coeur des routes maritimes. Par rapport au Gaz naturel liquéfié, grâce au gazoduc présent sur son territoire, le Royaume maritime est devenu une option mondiale pour le soutage, la réception et la redistribution de cette ressource énergétique.
Donc, pour bien tirer profit de cette situation, il serait opportun de miser sur ces navires de transport, pour non seulement pour répondre à la demande mondiale sur son phosphate et en maîtriser la logistique, mais aussi bien tirer profit du basculement vers le GNL. Une manoeuvre qui exige une vision à la fois court et long-termiste.
« Cela signifie qu’il faut doter le Maroc d’une flotte stratégique englobant la sécurité des approvisionnements énergétiques et alimentaires, les communications, la délégation de service public et les fonctions portuaires (lamanage, remorquage, pilotage, soutage) », poursuit le professeur Najib Cherfaoui. Et bonne nouvelle, selon notre interlocuteur, « eu égard à ce défi, l’Agence Nationale des Ports (ANP) dispose d’un potentiel humain très puissant pour réaliser une contribution technique tout à fait substantielle ».
Le maritime après l’automobile
Il faudrait donc impulser une vision stratégique et se donner les moyens de ses ambitions. Car le jeu en vaut la chandelle. L’industrie automobile nationale, qui tire pleinement profit de la situation actuelle, ne dira pas le contraire, grâce notamment aux investissements consentis depuis des années pour en faire un acteur capable de placer le Maroc sur la carte mondiale de l’automobile.
Et aujourd’hui, pour ce qui est du maritime, il faut l’avouer, le Maroc est encore très loin de tenir son rang mondial. Le pays dispose certes de la première plateforme maritime en Méditerranée, à savoir le Port Tanger Med, mais n’arrive toujours pas à relancer son pavillon national, disparu depuis une décennie.
Si l’exemple était calqué sur l’aérien, on dirait que le Maroc est une destination incontournable, mais sans flotte aérienne. Donc, ce sont les armateurs étrangers qui continuent d’en tirer profit et de fluctuer les prix selon leur guise, comme cela a pu conduire à une flambée sans précédent sur le fret maritime fin 2021 et début 2022. Là, il ne s’agit pas uniquement de sécuriser ses approvisionnements, mais d’être un acteur qui sera sollicité, et donc encore plus influent sur la carte maritime mondiale.
« Le Maroc est un pays qui ne dispose pas de gaz comme ressource naturelle, mais qui se retrouve en mesure de jouer le rôle de pivot, par sa position de carrefour », résume un professionnel du transport maritime, pour qui il ne faut surtout pas rater cette opportunité historique pour le royaume. A bon entendeur !